SOMMAIRE EQUITATION EN AMAZONE
95 CHAPITRES

SOMMAIRE EQUITATION EN AMAZONE

 

 

 

 

Le voyage en amazone

Et profiter du paysage (ici le belvédère de Florenville)

J'ai intitulé cet article " le voyage ", et non " la randonnée ". Le terme de randonnée a si souvent été galvaudé qu'il m'a semblé plus clair d'annoncer la couleur d'emblée. En effet, la plupart des cavaliers ont déjà pratiqué la randonnée, ou du moins ce que l'on appelle ainsi : aller d'un point à un autre, en quelques jours, à allures variées, en groupes plus ou moins importants, et en général avec intendance. Ce que je voudrais partager avec vous, c'est autre chose…
Je voudrais aussi faire preuve de modestie : le voyage à cheval est une passion pour moi, mais ce n'est pas mon métier. Loin de moi l'idée de comparer mes très modestes expériences à ceux qui partent des mois ou des années… et qui en font leur métier. Ils sont mes modèles, je n'en suis qu'une bien pâle copie.
Et enfin, je voudrais remercier celle qui m'a inoculée ce virus tenace, Myriam, ma compagne d'aventure, cavalière et cartographe émérite. Je laisse à mon excellent cheval Idaho (PRE de 15 ans) le soin d'apprécier son facétieux compagnon Bonhommet (PRE de 8 ans), qui met bien souvent à mal sa dignité de cheval de dame. Et on oubliera pas Ysbrand, mon gigantesque frison porte-bagages, qui met tout le monde d'accord avec son caractère égal et sa force tranquille...

L'équipe (de droite à gauche) : Myriam avec Bonhommet, le petit espagnol très farceur ; Moi en amazone avec Idaho, le très sérieux cheval de dame à la jolie robe isabelle ; et Ysbrand, notre porte-bagage de luxe, frison emmitouflé dans sa moustiquaire qui lui donne un look de cheval de tournois moyenâgeux. La photo a été prise par un de nos hébergeurs, en Ardenne Belge. (pour la petite histoire le magnifique frison souffre d'une maladie de peau, et le seul moyen de le protéger est ce costume bien bizarre mais pour lui c'est vital)

Préparatifs
Ca commence au cœur de l'hiver, devant les cartes… On rêve de découvrir une région… On parle d'un itinéraire (en Belgique ou en France généralement), du temps qu'on peut y consacrer (fichu boulot !), des chevaux et du matériel dont on dispose, et on trace, sur cartes routières, à raison de 25 à 40 km par jour, d'après les dénivelés. Une fois le tracé prédéfini, on prend contact avec le cartographe. Celui-ci communique alors, suivant l'itinéraire approximatif, une liste des relais disponibles dans un rayon de 5 à 10 km des points de chute supposés.

Ensuite commence l'organisation proprement dite : téléphoner aux relais (manèges, fermes, chambres d'hôtes, gîtes, particuliers, …), prendre connaissance de ce qu'ils proposent, et réserver auprès de ceux qui peuvent nous accueillir. Il est utile et poli de confirmer la réservation par courrier, ainsi que les termes des accords conclus : cela évite les mauvaises surprises. Ensuite, nous communiquons cette liste définitive à de notre cartographe, qui définit avec nous, et sur cartes d'état-major, les possibilités d'itinéraires, d'après ses plus récentes informations. Il ne s'agit pas toujours de chemins connus, et nous ferons des découvertes : il faut en tenir compte dans la longueur des étapes.

Il arrive aussi de se " planter " sur une carte : celui qui prétend ne jamais se tromper n'a jamais voyagé !
Myriam sera la dernière à me contredire… Ceci dit, en Belgique comme en France, on peut s'égarer certes, mais pas réellement se perdre… Evidemment, il y a le GPS, mais que fait-on quand un chemin renseigné est barré ? On reprogramme le GPS au milieu des champs ? ? ? Et puis qui dira la joie des réparations au papier collant, le soir au coin du feu, d'une carte 50 fois pliée, dépliée, déchirée… Et les jurons de Myriam sur le terrain, parce que là, juste à la pliure à moitié déchirée, il y a, outre notre chemin, une courbe de niveau, une ligne haute tension, 2 sentiers qui se croisent, un petit ruisseau, le tout sur fond vert foncé d'un bois de sapin de 2 cm carré… Bonhommet, dans ces moments-là, n'a pas intérêt à bouger ne fusse qu'une oreille !

Une fois le voyage terminé, nous irons passer quelques heures auprès du cartographe, pour lui communiquer toutes nos données concernant l'itinéraire (ceci est valable en Belgique, avec le cartographe de la Fédération Francophone d'Equitation). En France, ce sont les Comités Départementaux de Tourisme Equestre qui nous renseignent.

Pour la découverte du Jura, nous avons récolté toute la documentation possible, y compris le guide Michelin et surtout les dépliants du Grand 8. Et puis on a évalué les difficultés du terrain. Commencer par une boucle de 5-6 jours, en terrain pas trop sévère, histoire d'entraîner nos montures. Et puis une semaine dans le Haut Jura, avec de gros dénivelés et du terrain difficile. Enfin, une dernière boucle en Petite Montagne et en Bresse, histoire de revenir en Belgique non plus au sommet de leur forme et après de gros effort, mais en ayant déjà baissé le régime. En fonction de cela, on a goupillé tout le voyage, et ça reste un merveilleux souvenir, sans aucune anicroche. Pourtant, quand nous sommes arrivées là-bas, les autochtones étaient sceptiques : que venaient faire en montagne ces deux petites bonnes femmes belges (du Plat Pays, disait Jacques Brel), avec leurs chevaux espagnols, avec en plus l'idée saugrenue de monter en amazone… Ce n'était pas très raisonnable, tout ça…

Les relais
Les bons relais, devrais-je dire… Qu'est-ce qu'un bon relais ? Un tout premier lieu, c'est un endroit où l'on accueille correctement les chevaux ; et qui nous soigne aussi, accessoirement. Que faut-il pour eux ?
Une pâture.
Des boxes ou des stalles ?
Non, ce n'est pas nécessaire, du moins pas pendant la belle saison. Les chevaux de voyage vivent en général dehors et marchent toute la journée, il n'est pas très bon pour eux d'être confinés dans un espace réduit. Donc, pas de boxes, ou à la limite une grande stabulation, dans laquelle ils peuvent s'abriter.

Rien de tel qu’une petite sieste digestive après le déjeûner…

Il arrive parfois, rarement d'ailleurs, que nous soyons fraîchement reçus. Les randonneurs n'ont pas toujours bonne réputation… Style " cow-boy sans gêne ", ils plantent là le cheval avec armes et bagages et vont au plus vite se réfugier au bar, laissant le taxi aux bons soins de l'hébergeur… Avec nous, c'est plutôt le contraire : le cheval d'abord, règle d'or !
Et quand notre modeste monture est casée, bichonnée, nourrie et pansée, on apprécie encore plus la saveur d'un petit verre.
En général, nos hôtes, ayant observé tout cela, se dégèlent, deviennent bavards, curieux, et aux petits soins. Le voyage, c'est aussi découvrir les gens, et c'est inépuisable de richesse.

De la nourriture ? C'est mieux, mais pas indispensable si la pâture est bonne. Nos dadous sont trop fatigués pour se goinfrer d'herbe trop verte, et ont besoin de se reposer. Pas de risque de fourbure donc.

Dis, on peut manger ton pic-nic ?

Quelle nourriture ?
Les chevaux découvrent au jour le jour les produits du terroir, que nous analysons soigneusement avant de leur donner. Le fait qu'ils travaillent (si, si, c'est un travail, le voyage ! ) de manière calme et régulière fait que nous n'avons jamais eu d'ennuis de nourriture, même en changeant tous les jours. Etonnant, pas vrai ?

Lors d'une halte dans une ferme, on nous a proposé de la nourriture pour vaches, pleine de pulpes sèches ! On a mouillé abondamment le mélange, jusqu'à ce que la pulpe soit bien gorgée d'eau, et les chevaux ont adoré ! Comme quoi…

En cas de granulés, nous donnons une quantité moindre, pour éviter les bouchons. Si nos chevaux restent en boxe (ce que nous évitons, voir plus haut), ils ont du foin à volonté. Et s'ils ne mangent pas, on ne s'inquiète pas trop : c'est que ça ne leur plaît pas. Ils mangeront demain. A moins bien sûr de présenter des signes évident de coliques ou autre joyeuseté…

Mon brave Idaho, peu habitué à changer d'écurie au début de notre collaboration, refusait obstinément de manger si je n'étais pas présente. Très embêtant ! Il fallait lui " donner la becquée ". Nous l'avons habitué progressivement à accepter la nourriture d'autres personnes, et puis doucement, on lui a faussé compagnie… Maintenant, à moins d'une grosse contrariété, il mange n'importe où et de bon appétit!

Pour les cavaliers, tout dépend. Nous nous contentons d'un coin de fenil, du moment que l'endroit est sec. Si en plus, on nous y offre le souper et le déjeûner, c'est le Ritz : que demander de plus ? Mais on comprend tout à fait que tout le monde n'ait pas la même notion de confort ou d'inconfort : à chacun de juger.

Une chose me semble importante : nous pratiquons le voyage pour notre loisir, et ça doit rester un loisir pour nous : ce sont nos vacances après 11 mois de boulot sédentaire. Si ça devient une épreuve, il faut peut-être se poser la question des priorités : performance ou délassement ? ? ?

Le matériel
Il y a 2 solutions : soit on part en complète autonomie ; soit on part avec une intendance. Pour ce qui nous concerne, nous partons à 2 (cavalière et amazone), en autonomie.
Ici encore, 2 solutions : avec ou sans cheval de bât.
Le cheval de bât offre un confort incomparable (lisez les grands voyageurs : Brager ou Bigot ne voyagent pas sans…) : on peut se permettre quelques extras : plus de vêtements de rechange, un couchage plus confortable, des provisions pour bêtes et gens, une tente, etc… Dans notre cas, c'était moi qui tenait Ysbrand en dextre le plus souvent, Myriam étant occupée par la carte.


Faire le point avec les cartes


Tenir un cheval en dextre en amazone n'est pas plus compliqué qu'à califourchon : c'est, comme pour beaucoup de choses, une question d'apprentissage. Nous n'avons pas choisi son format (très grand et très lourd, l'inverse de ce que l'on conseille généralement) mais c'était mon second cheval, je ne voulais pas le laisser à la maison, et il venait bien à point pour porter nos bagages. On l'a donc habitué en quelques sorties à marcher aux côtés d'Idaho, légèrement en arrière et toujours à droite (question de sécurité). Idaho a l'habitude d'être mené à une main, et connaît suffisamment son métier pour que je puisse le monter sans cravache : l'assiette suffit. J'ai donc pris Ysbrand en dextre, on a essayé les allures, on a mis les paquetages, et on est partis ! Myriam et Bonhommet (avec lequel Ysbrand a plus d'affinités qu'avec Idaho) se sont aussi essayés à la monte en dextre, sans plus de problèmes. Nous avons la chance d'avoir 3 chevaux d'excellent caractère, qui vivent ensemble en pâture, ignorent ce que c'est que mordre ou botter, et sont très respectueux à pied comme montés. Ceci explique la relative simplicité de cette conversion d'un très beau frison en porte-paquets. Il était aussi important qu' Ysbrand puisse être pris en dextre par Myriam ou par moi : en effet, nous devons être égales et indépendantes dans la manipulation de nos chevaux, sécurité oblige.

La complicité entre chevaux est indispensable

Il est aussi arrivé que je doive tenir les 3 chevaux en flèche et avancer, tandis que Myriam ouvrait une barrière ou faisait une reconnaissance à pied : le tout est que les chevaux s'entendent…

Sans cheval de bât, pas de folie : il faut arriver à mettre l'indispensable dans… 4 sacoches d'une contenance de 4 à 8 litres. Oui, j'ai bien dit 4 : l'amazone permet en effet de répartir plus de sacoches que la monte à califourchon : j'y reviendrai plus tard. Mais attention, l'arme est à double tranchant : l'objectif n'est pas de transformer notre monture préférée en mulet : n'oublions pas qu'il nous porte aussi ! 60 kg d'amazone, 10 kilos de selle et encore 15 kg de paquetage, ça fait beaucoup... Ca fait en tout cas plus que ce que peut prendre un cavalier à califourchon, qui n'a pas autant de possibilités, comme vous l'aller voir.

Le paquetage de l'amazone
Quelques photos sont beaucoup plus parlantes qu'un long discours. Ma selle d'amazone a été équipée de 5 anneaux à l'arrière, ainsi que d'un renfort aux 2 anneaux du collier de chasse. Ces anneaux sont en laiton, car au contact des mousquetons, d'autres anneaux ont montré des signes d'usure.
J'ai imaginé et constitué cet équipement moi-même car il n'existe rien de prévu pour la monte dans les fourches, et l'ai testé entre autres dans le Haut Jura, pendant 3 semaines. Et il est en nylon traité, pas en cuir. Encore une fois, question de poids, et aussi de facilités pour les travaux de transformation.

Derrière la selle : le paquetage classique de cavalier, mais posé plus loin sur le dos du cheval, alors que normalement, il se positionne sur la jupe de la selle. Attention, pas sous la selle : il faut que la colonne vertébrale du cheval reste libre, autant que possible. Ce paquetage est composé de 2 sacoches latérales et d'un sac central contenant mon sac de couchage. Personnellement, j'y niche mon GSM, en sécurité dans les plis du sac, qui est dans un sac poubelle, à l'abri des coups et de l'humidité…

Le paquetage vu du côté gauche, avec la cravache à dragonne.

le paquetage vu du côté droit

 

Côté droit : d'arrière en avant, on voit la sacoche latérale droite du gros paquetage de derrière, et 2 sacoches supplémentaires. Ces deux sacoches sont reliées par un même panneau, et s'accrochent à l'arrière de la selle, et à l'anneau du collier de chasse devant. J'y ai ajouté des lanières me permettant d'y accrocher un vêtement ou autre chose. Devant, on voit la fonte droite, bien remplie, surmontée du petit étui de l'appareil photo. Au départ, il s'agissait de 2 fontes classiques. Il y a toujours 2 fontes, mais l'une, la gauche, a perdu toute son épaisseur, pour se glisser SOUS le garde-jambe, attachée à l'anneau du collier de chasse avant gauche. Elle contient uniquement mes papiers, et est toute plate. Qui irait chercher mes papiers sous mes jupes ?

Côté gauche : d'arrière en avant, on retrouve la sacoche arrière de paquetage. Le long de cette sacoche, j'ai coutume de pendre, juste derrière la jambe, une mince banane qui contient mon matelas pneumatique, pièce très lourde mais indispensable à mon confort.
A cela j'ajoute souvent une longe d'environ 8 mètres : ça peut toujours servir, ainsi qu'une sangle. Il y a aussi les latigos (les lacets, c'est moins savant et plus commun), indispensables pour tout, et un stock de petits mousquetons en laiton , pour accrocher tout et n'importe quoi…

Tout ce matériel est équilibré au gramme prêt. C'est important. Un cheval qui s'en tire avec une petite plaque sans poils au bout de 3 jours de randonnée ne fera pas un long voyage si on n'y prend garde. Pour l'équilibrage de ma selle, paquetage et amazone compris, j'ai constaté qu'une différence de 1 kg était idéale. Je m'explique : j'embarque 1 kg supplémentaire à droite par rapport à gauche, et ma selle s'équilibre sans balancine sous mon poids. Cette mesure est valable pour moi, avec mon cheval, ma selle, ma taille et mon matériel. A chacune de voir pour elle-même. Je précise que mon cheval a été vu par un ostéopathe avant et après voyage, à chaque fois, et que celui-ci n'a décelé aucune différence de masse musculaire entre la gauche et la droite, preuve s'il en est que le développement musculaire a été harmonieux malgré la monte dans les fourches.

En voyage, il existe 2 écoles : soit on sangle " bien ", soit on ne sangle pas du tout. Pour ma sécurité, j'ai opté pour " bien " sangler la sangle elle-même, mais ma balancine est lâche. A chacune de faire sa propre expérience. J'emploie une sangle très large, en nylon tressé, équipée d'une boucle d'équilibrage. Pas de sangle en cuir : à moins d'un entretien plus que rigoureux, il y a risque de blessure dès qu'elle est souillée.

Quand il faut préparer son cheval sous la pluie…

Que prendre ?
Dans ce matériel, c'est l'indispensable des chevaux qu'il faut caser : trousse de maréchalerie (éventuellement fers de rechange), trousse vétérinaire et humaine, matériel de pansage et répulsifs efficaces. Nous ne nous embarrassons pas de nourriture, à part notre pic-nic du jour. On n'est pas en Patagonie…
Chaussures de rechange : le plus pratique : des petits mocassins sans talons, en cuir et avec une bonne semelle. Ces chaussures sont destinées à être portées partout où l'on n'est pas à cheval, elles doivent être pratiques, ne pas prendre de place et bien tenir aux pieds.
Les vêtements : vaste débat, vaste sujet, mais petit espace. Donc, on prend l'indispensable : des sous-vêtements de rechange facilement lavables, sans lésiner sur la qualité. Un minimum de 3 paires de chaussettes en coton, pour éviter les échauffements.
Quelques T-shirts ou des chemises (qui ont l'avantage d'être multipoches), comme on préfère, du moment que ça ne doit pas être repassé après lavage.
Si on monte en hiver, le bon vieux collant en dessous du pantalon a fait ses preuves. Et surtout on pratique la technique de l'oignon : pas besoin d'un gros pull bien encombrant : il est plus facile de mettre 2 pulls fins qui au total tiendront plus chaud. Le polair est pour cela extraordinaire. Un pantalon civil en plus d'un jodhpur de rechange, ça sert toujours. Un anorak, qui peut se doubler de polair. Pour tout cela, un tube de savon liquide pour vêtements, et on fait sa petite lessive régulièrement...

Une fois qu'on a rassemblé tout son petit matériel, on s'installe à son aise dans un espace suffisamment grand, avec d'un côté le matériel et une balance de ménage, et de l'autre nos sacoches. Et on fait des petits paquets : tous les vêtements seront emballés séparément ou par sortes, dans des sacs de congélation grand format avec zip. Ce système est le seul qui protège efficacement de l'humidité.

Commence alors la répartition, à partir du pesage, étape indispensable.
Règle de base : tout ce qui va aller côté " cheval " des sacoches doit être plat, sans angles. Un exemple : on garnira le fond de la sacoche " vêtements " avec un essuie, pour amortir les chocs et protéger le cheval.
Autre règle : tout ce qui est lourd va dans le bas des sacoches, mais ça, c'est élémentaire !

Petit détail : on ne fixe rien avec des velcros : d'expérience, je peux vous dire qu'un bon velcro ne résiste pas à la traversée d'une forêt de sapins non élagués (Que faisais-je là, me direz-vous avec raison ? Il s'agissait d'un itinéraire alternatif et peu probable : un égarement passager… qui nous a coûté un appareil photo !).

Les élastiques ne sont pas à conseiller non plus : ils se détendent, s'usent, craquent… au plus mauvais moment. Par contre, les lanières d'éperons sont impeccables pour tout attacher : truc à retenir !

Ah oui, détail important : on ne fait pas ça 2 jours avant de partir. On fait ça 1 à 2 mois à l'avance, et on " teste " le tout sur de courtes escapades de 3 ou 4 jours, avant le grand départ. Il sera toujours temps d'arranger l'un ou l'autre détail, mais pas au dernier moment. Cheval blessé = voyage terminé.

Et puis on pose tout ça sur le cheval, et on voit ce qui cloche. Idéalement, il ne faudrait pas que le paquetage soit en contact avec le poil, ni qu'il y ait du poids sur l'arête dorsale. A cet effet, j'ai donc bricolé une autre pièce spéciale : 2 grand tapis navajos, raccourcis à la longueur de ma selle, avec un débordant devant et derrière pour les fontes et les sacoches, et cousus ensemble sur 3 côtés, en laissant l'arrière libre, comme une housse. Et là-dedans, j'ai enfilé un très gros tapis de selle américain en feutre, bien long et bien dégarroté, et aéré par des trous sur l'arête dorsale. Quand c'est sale, il suffit de laver les navajos, le tapis de feutre est nickel. Jusqu'à aujourd'hui, je n'ai pas à déplorer le moindre pépin, touchons du bois !

Pour achever tout ça, et comme je fréquente tous types de terrains, je ne monte jamais sans une bricole. Idaho est bridé (sans mors) avec un hackamore, et porte toujours licol et corde à 2 mousquetons. Voilà, je crois que j'ai fait le tour…

Mes atours
J'adore les jolies tenues d'amazone, et je les collectionne, mais pas en voyage ! ! ! Foin d'élégance, il faut être efficace. Donc, pour moi, cela se traduit pas des bottines de randonnée avec une bonne semelle crantée, et bien graissées pour ne pas prendre eau. Des mini-chaps bien ajustés mais pas trop hauts (ça coince au genou), et un tablier de chasse anglais pas trop serrant (en jeans noir, indéchirable et inusable, je vous recommande la matière). Je porte souvent un gilet sans manches (pratique pour les poches surtout), sur chemise ou T-shirt. Mon couvre-chef m'est indispensable : il s'agit d'un chapeau australien, en cuir, ultra-léger, et avec une coiffe en treillis, bien aérée. Par soleil, il m'évite de ressembler à un homard Thermidor, et par pluie, il ne fait pas gouttière dans mes yeux. Le détail qui tue : un latiguo sert de mentonière… Sinon, adieu chapeau au premier galop…

Ce fameux chapeau m'a valu une chute inoubliable. Que je vous explique : au milieu d'un joli petit bois, Idaho se tenait sagement au montoir, à côté d'un tronc. Je reprends ma jupe, saisis les rênes, mets le pied à l'étrier et … Zouuuuuuuuuu…. En un coup, je me retrouve brutalement tirée vers le bas, chapeau enfoncé jusqu'aux yeux… La mentonière s'était accrochée à la fourche inférieure. Lentement, sans pouvoir me retenir, je glisse le long de mon cheval, jusqu'à l'atterrissage tout en douceur et complètement hilare en dessous d'Idaho. Lui, un peu surpris, fait un pas en arrière, et m'écrabouille gentiment la cuisse : j'en ai gardé un très beau tatouage, un peu douloureux : mofif fer à cheval avec mordax …

Les lunettes de soleil ne sont jamais très loin dans les fontes, mais protégées par un étui rigide. Idem pour la crème solaire : le tube d'écran total me suit partout.

En route…
Le démarrage : on prévoira une étape courte : 15 km environ. Il faut que le cheval prenne son rythme, qu'il sente son paquetage, et puis on a rarement le temps d'entraîner réellement son cheval. Donc, on entraîne " sur le tas ", en augmentant la distance et la difficulté des étapes. A condition de faire ça intelligemment, tout devrait bien se passer.

Une dame de mes connaissances, nouvelle convertie à la randonnée, décide de tenter l'aventure. Elle monte son pur-sang assidûment, et de jour en jour augmente la résistance du cheval en vue de son voyage, à allures variées. Celui-ci est au top de sa forme au jour du départ, du moins le croit-elle… Elle charge les paquetages et… ça s'est terminé tristement 3 jours plus tard par un retour en van à l'écurie. La dame avait négligé un détail : le poids du paquetage sur les reins de son cheval, qui n'a pas supporté la surcharge et s'est bloqué les reins. Ca n'arrive pas qu'aux autres…

Il faut 3 ou 4 jours pour se mettre dans le bain. Les 3 premiers jours, c'est encore l'euphorie et pas encore les automatismes. Et puis il y a la baisse de forme : la journée où tout va mal. Le dadou est de mauvais poil, il y a une sangle cassée, on se demande dans quelle galère on s'est embarqué, on a mal partout et monter ne fait qu'empirer les choses … On rêve de son lit et on maudit la terre entière. Et le lendemain, miracle : là, on est vraiment parti : on peut voyager une semaine, un mois, un an…

Tous les soucis quotidiens sont envolés, on prend la vie au jour le jour, et on en profite… A l'identique, à la fin de la randonnée, les 2 derniers jours, c'est désagréable parce qu'on a aucune envie de rentrer et de retrouver le quotidien : toute l'équipe est dans le voyage et veut y rester.

Le rythme de la journée. Nous la divisons, d'après la distance, en 2/3 le matin, une halte à midi et 1/3 l'après-midi. Nos montures sont désellées et laissées en longe ou en liberté, de quoi faire le plein d'herbe fraîche à midi. En général, ils mangent leur comptant, et se reposent près de nous… Pour les encourager, une friandise les attend avant le départ d'après-midi. On a bien droit à un dessert, non ? ? ?

Idaho est très curieux : « Qu’est-ce que tu manges ? »

Pour les allures, cela dépend du terrain… En général, on marche, on marche, et on marche encore : un bon rythme, souple et soutenu, un peu plus rapide que la marche à pied : il faut compter faire au maximum de 5 km/heure. Plus, c'est de l'ineptie, ou de l'endurance (biffez la mention inutile).

On n'oublie pas qu'on est en vacances, et qu'on en profite ! Inutile d'arriver avec les reins cassés, crevés, et le dos en compote. Enfin, c'est ma philosophie… Vous faites ce que vous voulez ! ! !

Un bon moyen pour évaluer la forme des dadous : la demande d'un petit galop gentil, en terrain facile et en fin de journée. Si ça démarre au quart de tour, moral et physique sont bosn. Sinon, il faut faire attention.

Les jours de repos, plus utiles pour les cavalières que pour les chevaux, qui sont en pleine forme et n'en ont visiblement pas besoin : tous les 5-6 jours, c'est bien. On peut faire sa lessive, mettre de l'ordre, voir vivre les chevaux, profiter des curiosités du pays, se reposer…

Deux petits chevaux bien musclés, prêts à affronter les dénivelés du Jura

Ici encore, il existe plusieurs options : soit on rallie les étapes à allures plus rapides et les chevaux ont besoin de jours de repos, soit on progresse plus doucement et régulièrement, et les chevaux vous emmènent au bout du monde. C'est comme on le sent. Souvent, la nécessité commerciale de chevaux de location mis à disposition de cavaliers avides de sensations fortes induit la première proposition, avec allures et sans paquetage. Nous, nous partons avec nos chevaux personnels, ce sont nos compagnons d'aventure : nous partons à 4 ou à 5, et chacun, cavalier ou cheval, a son mot à dire. Nous ne partons pas à 2 cavalières et une cavalerie. C'est une autre manière d'aborder les choses, et ce n'est pas possible pour tout le monde…

Parlons vie courante, et contraintes horaires. Eh oui, ce n'est pas parce qu'on est en vacances qu'il faut faire grasse matinée… Enfin, si vous voulez arriver à l'étape du soir, bien sûr ! En général, on essaye de ne pas aller dormir trop tard, mais ce n'est pas toujours évident. Nos hôtes d'un soir sont souvent intarissables. Ouiche ! Sauf que nous, après 7-8 heures de selle, on tombe de sommeil. On évite aussi d'abuser de la boisson ou d'un repas trop copieux : être malade en voyage, ça n'a rien de drôle... Et on se lève dès potron-minet : les hôtes sont fatigués et dorment encore : on a tout loisir pour s'occuper des chevaux pour partir avant les chaleurs du jour, frais et dispos pour de nouvelles aventures...

Spécificités du terrain par rapport à la monte en amazone
Je serais tentée de dire qu'il n'y a aucune différence à faire entre une amazone et une cavalière. C'est certainement à l'amazone de savoir se débrouiller pour ne pas avoir donner l'air d'être " la petite madame délicate " qu'on hésite à accompagner. Donc, on perfectionne son autonomie : on se débrouille pour arriver en haut de sa selle, et tant pis si ce n'est pas académique : les écureuils ne feront pas de commentaires, promis !

Les allures ne posent aucun problème : toutes les amazones savent ça. Un petit obstacle naturel fait aussi partie du décor courant. Donc, la consigne quand on est amazone et qu'on voudrait partir en voyage : être à l'aise aux trois allures et en extérieur, en plus d'être débrouillarde.

De passage chez une connaissance…

Je suis un très mauvais exemple pour épargner mon cher cheval : en effet, des difficultés à marcher font qu'en forte montée, il me sert de remonte-pente, quand je ne reste pas dessus. En descente, par contre, je n'hésite jamais à mettre pied-à-terre, surtout s'il s'agit de macadam. Cependant, il peut parfois être plus prudent de rester à cheval, question d'équilibre. Autre solution plus radicale : tout le monde à pied, et le cheval totalement en liberté : c'est chose courante en pays de montagne.

J'ai souvenir d'un superbe chemin muletier en Basses Pyrénées : nous étions descendus de nos montures sur conseil de notre guide, et nous descendions à pied une pente très très raide et fort caillouteuse. Les chevaux marchaient plus vite que nous. Arrivés en bas avant nous, ils nous attendaient tranquillement, et nous n'avons plus eu qu'à remonter en selle.

Dans le Haut Jura, du côté de la Rixouse, notre halte nous attendait, gîte blotti au fond d'une très jolie vallée. La route asphaltée pour y accéder descendait comme sur un toit, et ça glissait, ça glissait, pendant 3 km... Nous avons fait ces 3 km à pied. Les chevaux allaient très bien, merci, mais nos genoux étaient en feu à l'arrivée ! ! ! Quel souvenir… Le départ du lendemain matin ne fut guère plus glorieux : il a fallut tout remonter !

En rentrant du Jura, nous avons eu la surprise de trouver au courrier la lettre d’un de nos hébergeurs, Francis Baron, à Crenans. Journaliste à ses heures, il avait envoyé un petit article nous concernant au quotidien « Le Progrès ».

Le départ et l'arrivée d'une journée se font à pied, selon le même principe que pour tout autre exercice. Nous sellons, bridons, et nous mettons en route. Après quelques minutes de marche, on trouve un bon montoir, on ressangle, et on se met en selle. Au sujet du montoir, ce n'est pas réservé qu'aux amazones : les cavaliers en profitent autant que leurs chevaux : ce n'est en effet pas excellent pour le garrot et le dos d'être tirés brutalement et toujours d'un même côté au moment de la mise en selle. Qui plus est, comme en randonnée, on a l'habitude de ne pas sangler très fort, le montoir s'avère vite indispensable. L'amazone ne sera donc pas l'exception qu'on devra attendre…

Petite histoire de montoir, arrivée à l'une de mes amies, apprentie amazone qui nous accompagnait en extérieur. Son cheval était très calme, mais elle manquait de souplesse et d'assurance. On lui trouve un montoir bien haut : un tas de bûches, un peu branlantes, certes, et humides de pluie, mais bon… Je la précède et tout se passe bien. Elle veut me suivre, arrive péniblement sur LA bûche qui glissait, opère un demi-tour périlleux, se redresse, rassemble ses rênes, glisse un peu, se rattrape, prend son tablier, avance un pied, le remet précipitamment parce que " ça bouge ", se tortille, cherche une autre bûche d'appui, recommence, etc … Quand enfin elle tend son pied vers l'étrier, son brave cheval qui pendant 5 minutes n'avait pas bougé un cil , opère tranquillement un quart de tour ! On a tous éclaté de rire, y compris l'infortunée…

A l'arrivée d'une étape, même chose qu'au départ. On met pied à terre un peu avant, ne fusse que quelques mètres et on dessangle d'un trou. Libérer un peu le harnachement fait qu'il masse doucement la musculature du dos du cheval avec le mouvement de marche. Ensuite, à la halte, on va pouvoir tout à loisir déshabiller le cheval et vérifier que tout va bien.

Autre petite chose qui nous semble aberrante : donner à boire dès l'arrivée d'une étape, et ne pas laisser le cheval boire dans les flaques (enfin, pas n'importe quelle flaque : nous évitons les flaques entre terrains de cultures, car on y trouve des traces d'engrais). Souvent, en voyage, nous ne connaissons pas ce que le terrain nous réserve, donc toutes les occasions sont bonnes pour abreuver les chevaux, y compris les flaques d'eau. Nos chevaux sont assez " instinctifs " que pour ne pas boire ce qui n'est pas bon pour eux. Les priver d'eau pendant l'étape et les laisser s'abreuver en un coup, juste après l'effort, à l'arrivée de l'étape, peut les rendre malades, tout simplement.

Idaho et Ysbrand s’abreuvent à une fontaine de village…

La douche : sujet controversé. En ce qui nous concerne, nous ne douchons que rarement nos chevaux. Parfois, nous douchons les membres, en douche baveuse, s'il fait vraiment chaud, ou si une situation critique le demande : suspiccion de blessure, boue excessive, jambes enflées...

Photo prise lors de notre périple en Belgique pendant 25 jours, Ysbrand sortant de la douche, brillait sous le soleil, avant qu’on le réemballe dans sa moustiquaire.

Après discussion avec vétérinaire et ostéopathe, il ne nous semble pas opportun de doucher, au jet violent et à l'eau froide, des muscles qui sont encore échauffés. L'effet peut être très néfaste : blocage des reins ou crise de tétanie par exemple. Nous préférons, lors de la journée de halte, prendre le temps de bichonner nos montures, et leur administrer une douche tiède et baveuse, qui fera partir la transpiration des jours précédents et les délassera réellement, sans leur faire de tort.

De même pendant ce jour de repos, nous sellerons nos montures et irons balader une heure ou deux : on arrête pas l'athlète en plein effort, et nos chevaux sont de vrais athlètes. Ce jour de repos, ils le passeront aussi en pré, bien sûr. Pas question de les laisser enfermés, sous peine de récupérer des chevaux à la limite de la lymphangite !

Pas vraiment besoin de courir au fond d’une prairie pour attraper ces deux loustics…

Eh bien voilà : quelques pages que j'ai pris énormément de plaisir à écrire, non pour prouver un savoir quelconque mais pour vous faire partager mes quelques expériences d'amazone d'extérieur, en espérant que cet article incitera l'une ou l'autre d'entre vous à tenter l'aventure. Le voyage, ce n'est pas bien compliqué, il suffit de s'y lancer, avec prudence et bon sens. Si cela vous fait rêver, n'hésitez pas, cela en vaut vraiment la peine. Le voyage, c'est une impression de liberté à vous couper le souffle, une complicité à nulle autre pareille avec son cheval, à la portée de chacun. Il suffit de le vouloir.

Vous avez dit « sérieux » ? Vous en connaissez, des chevaux qui font du cheval-stop ?

 

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