J'ai intitulé
cet article " le voyage ", et non " la randonnée
". Le terme de randonnée a si souvent été
galvaudé qu'il m'a semblé plus clair d'annoncer la
couleur d'emblée. En effet, la plupart des cavaliers ont
déjà pratiqué la randonnée, ou du moins
ce que l'on appelle ainsi : aller d'un point à un autre,
en quelques jours, à allures variées, en groupes plus
ou moins importants, et en général avec intendance.
Ce que je voudrais partager avec vous, c'est autre chose
Je voudrais aussi faire preuve de modestie : le voyage à
cheval est une passion pour moi, mais ce n'est pas mon métier.
Loin de moi l'idée de comparer mes très modestes expériences
à ceux qui partent des mois ou des années
et
qui en font leur métier. Ils sont mes modèles, je
n'en suis qu'une bien pâle copie.
Et enfin, je voudrais remercier celle qui m'a inoculée ce
virus tenace, Myriam, ma compagne d'aventure, cavalière et
cartographe émérite. Je laisse à mon excellent
cheval Idaho (PRE de 15 ans) le soin d'apprécier son facétieux
compagnon Bonhommet (PRE de 8 ans), qui met bien souvent à
mal sa dignité de cheval de dame. Et on oubliera pas Ysbrand,
mon gigantesque frison porte-bagages, qui met tout le monde d'accord
avec son caractère égal et sa force tranquille...
L'équipe (de droite à gauche) : Myriam avec Bonhommet,
le petit espagnol très farceur ; Moi en amazone avec Idaho, le très
sérieux cheval de dame à la jolie robe isabelle ; et Ysbrand, notre
porte-bagage de luxe, frison emmitouflé dans sa moustiquaire qui
lui donne un look de cheval de tournois moyenâgeux. La photo a été
prise par un de nos hébergeurs, en Ardenne Belge. (pour la petite
histoire le magnifique frison souffre d'une maladie de peau, et
le seul moyen de le protéger est ce costume bien bizarre
mais pour lui c'est vital)
Préparatifs
Ca commence au cur de l'hiver, devant les cartes
On
rêve de découvrir une région
On parle
d'un itinéraire (en Belgique ou en France généralement),
du temps qu'on peut y consacrer (fichu boulot !), des chevaux et
du matériel dont on dispose, et on trace, sur cartes routières,
à raison de 25 à 40 km par jour, d'après les
dénivelés. Une fois le tracé prédéfini,
on prend contact avec le cartographe. Celui-ci communique alors,
suivant l'itinéraire approximatif, une liste des relais disponibles
dans un rayon de 5 à 10 km des points de chute supposés.
Ensuite commence l'organisation
proprement dite : téléphoner aux relais (manèges,
fermes, chambres d'hôtes, gîtes, particuliers,
),
prendre connaissance de ce qu'ils proposent, et réserver
auprès de ceux qui peuvent nous accueillir. Il est utile
et poli de confirmer la réservation par courrier, ainsi que
les termes des accords conclus : cela évite les mauvaises
surprises. Ensuite, nous communiquons cette liste définitive
à de notre cartographe, qui définit avec nous, et
sur cartes d'état-major, les possibilités d'itinéraires,
d'après ses plus récentes informations. Il ne s'agit
pas toujours de chemins connus, et nous ferons des découvertes
: il faut en tenir compte dans la longueur des étapes.
Il arrive aussi de se
" planter " sur une carte : celui qui prétend ne
jamais se tromper n'a jamais voyagé !
Myriam sera la dernière à me contredire
Ceci
dit, en Belgique comme en France, on peut s'égarer certes,
mais pas réellement se perdre
Evidemment, il y a le
GPS, mais que fait-on quand un chemin renseigné est barré
? On reprogramme le GPS au milieu des champs ? ? ? Et puis qui dira
la joie des réparations au papier collant, le soir au coin
du feu, d'une carte 50 fois pliée, dépliée,
déchirée
Et les jurons de Myriam sur le terrain,
parce que là, juste à la pliure à moitié
déchirée, il y a, outre notre chemin, une courbe de
niveau, une ligne haute tension, 2 sentiers qui se croisent, un
petit ruisseau, le tout sur fond vert foncé d'un bois de
sapin de 2 cm carré
Bonhommet, dans ces moments-là,
n'a pas intérêt à bouger ne fusse qu'une oreille
!
Une fois le voyage terminé,
nous irons passer quelques heures auprès du cartographe,
pour lui communiquer toutes nos données concernant l'itinéraire
(ceci est valable en Belgique, avec le cartographe de la Fédération
Francophone d'Equitation). En France, ce sont les Comités
Départementaux de Tourisme Equestre qui nous renseignent.
Pour la découverte
du Jura, nous avons récolté toute la documentation
possible, y compris le guide Michelin et surtout les dépliants
du Grand 8. Et puis on a évalué les difficultés
du terrain. Commencer par une boucle de 5-6 jours, en terrain pas
trop sévère, histoire d'entraîner nos montures.
Et puis une semaine dans le Haut Jura, avec de gros dénivelés
et du terrain difficile. Enfin, une dernière boucle en Petite
Montagne et en Bresse, histoire de revenir en Belgique non plus
au sommet de leur forme et après de gros effort, mais en
ayant déjà baissé le régime. En fonction
de cela, on a goupillé tout le voyage, et ça reste
un merveilleux souvenir, sans aucune anicroche. Pourtant, quand
nous sommes arrivées là-bas, les autochtones étaient
sceptiques : que venaient faire en montagne ces deux petites bonnes
femmes belges (du Plat Pays, disait Jacques Brel), avec leurs chevaux
espagnols, avec en plus l'idée saugrenue de monter en amazone
Ce n'était pas très raisonnable, tout ça
Les relais
Les bons relais, devrais-je dire
Qu'est-ce qu'un bon relais
? Un tout premier lieu, c'est un endroit où l'on accueille
correctement les chevaux ; et qui nous soigne aussi, accessoirement.
Que faut-il pour eux ?
Une pâture.
Des boxes ou des stalles ?
Non, ce n'est pas nécessaire, du moins pas pendant la belle
saison. Les chevaux de voyage vivent en général dehors
et marchent toute la journée, il n'est pas très bon
pour eux d'être confinés dans un espace réduit.
Donc, pas de boxes, ou à la limite une grande stabulation,
dans laquelle ils peuvent s'abriter.
Rien de tel qu’une petite sieste digestive après
le déjeûner…
Il arrive
parfois, rarement d'ailleurs, que nous soyons fraîchement
reçus. Les randonneurs n'ont pas toujours bonne réputation
Style " cow-boy sans gêne ", ils plantent là
le cheval avec armes et bagages et vont au plus vite se réfugier
au bar, laissant le taxi aux bons soins de l'hébergeur
Avec nous, c'est plutôt le contraire : le cheval d'abord,
règle d'or !
Et quand notre modeste monture est casée, bichonnée,
nourrie et pansée, on apprécie encore plus la saveur
d'un petit verre.
En général, nos hôtes, ayant observé
tout cela, se dégèlent, deviennent bavards, curieux,
et aux petits soins. Le voyage, c'est aussi découvrir les
gens, et c'est inépuisable de richesse.
De la nourriture
? C'est mieux, mais pas indispensable si la pâture est bonne.
Nos dadous sont trop fatigués pour se goinfrer d'herbe trop
verte, et ont besoin de se reposer. Pas de risque de fourbure donc.
Dis, on peut manger ton pic-nic ?
Quelle
nourriture ?
Les chevaux découvrent au jour le jour les produits du terroir,
que nous analysons soigneusement avant de leur donner. Le fait qu'ils
travaillent (si, si, c'est un travail, le voyage ! ) de manière
calme et régulière fait que nous n'avons jamais eu
d'ennuis de nourriture, même en changeant tous les jours.
Etonnant, pas vrai ?
Lors d'une
halte dans une ferme, on nous a proposé de la nourriture
pour vaches, pleine de pulpes sèches ! On a mouillé
abondamment le mélange, jusqu'à ce que la pulpe soit
bien gorgée d'eau, et les chevaux ont adoré ! Comme
quoi
En cas
de granulés, nous donnons une quantité moindre, pour
éviter les bouchons. Si nos chevaux restent en boxe (ce que
nous évitons, voir plus haut), ils ont du foin à volonté.
Et s'ils ne mangent pas, on ne s'inquiète pas trop : c'est
que ça ne leur plaît pas. Ils mangeront demain. A moins
bien sûr de présenter des signes évident de
coliques ou autre joyeuseté
Mon brave
Idaho, peu habitué à changer d'écurie au début
de notre collaboration, refusait obstinément de manger si
je n'étais pas présente. Très embêtant
! Il fallait lui " donner la becquée ". Nous l'avons
habitué progressivement à accepter la nourriture d'autres
personnes, et puis doucement, on lui a faussé compagnie
Maintenant, à moins d'une grosse contrariété,
il mange n'importe où et de bon appétit!
Pour les
cavaliers, tout dépend. Nous nous contentons d'un coin de
fenil, du moment que l'endroit est sec. Si en plus, on nous y offre
le souper et le déjeûner, c'est le Ritz : que demander
de plus ? Mais on comprend tout à fait que tout le monde
n'ait pas la même notion de confort ou d'inconfort : à
chacun de juger.
Une chose
me semble importante : nous pratiquons le voyage pour notre loisir,
et ça doit rester un loisir pour nous : ce sont nos vacances
après 11 mois de boulot sédentaire. Si ça devient
une épreuve, il faut peut-être se poser la question
des priorités : performance ou délassement ? ? ?
Le matériel
Il y a 2 solutions : soit on part en complète autonomie ;
soit on part avec une intendance. Pour ce qui nous concerne, nous
partons à 2 (cavalière et amazone), en autonomie.
Ici encore, 2 solutions : avec ou sans cheval de bât.
Le cheval de bât offre un confort incomparable (lisez les
grands voyageurs : Brager ou Bigot ne voyagent pas sans
) :
on peut se permettre quelques extras : plus de vêtements de
rechange, un couchage plus confortable, des provisions pour bêtes
et gens, une tente, etc
Dans notre cas, c'était moi
qui tenait Ysbrand en dextre le plus souvent, Myriam étant
occupée par la carte.
Faire le point avec les cartes
Tenir un cheval en dextre en amazone n'est pas plus compliqué
qu'à califourchon : c'est, comme pour beaucoup de choses,
une question d'apprentissage. Nous n'avons pas choisi son format
(très grand et très lourd, l'inverse de ce que l'on
conseille généralement) mais c'était mon second
cheval, je ne voulais pas le laisser à la maison, et il venait
bien à point pour porter nos bagages. On l'a donc habitué
en quelques sorties à marcher aux côtés d'Idaho,
légèrement en arrière et toujours à
droite (question de sécurité). Idaho a l'habitude
d'être mené à une main, et connaît suffisamment
son métier pour que je puisse le monter sans cravache : l'assiette
suffit. J'ai donc pris Ysbrand en dextre, on a essayé les
allures, on a mis les paquetages, et on est partis ! Myriam et Bonhommet
(avec lequel Ysbrand a plus d'affinités qu'avec Idaho) se
sont aussi essayés à la monte en dextre, sans plus
de problèmes. Nous avons la chance d'avoir 3 chevaux d'excellent
caractère, qui vivent ensemble en pâture, ignorent
ce que c'est que mordre ou botter, et sont très respectueux
à pied comme montés. Ceci explique la relative simplicité
de cette conversion d'un très beau frison en porte-paquets.
Il était aussi important qu' Ysbrand puisse être pris
en dextre par Myriam ou par moi : en effet, nous devons être
égales et indépendantes dans la manipulation de nos
chevaux, sécurité oblige.
La complicité entre chevaux est indispensable
Il est aussi arrivé
que je doive tenir les 3 chevaux en flèche et avancer, tandis
que Myriam ouvrait une barrière ou faisait une reconnaissance
à pied : le tout est que les chevaux s'entendent
Sans cheval de bât,
pas de folie : il faut arriver à mettre l'indispensable dans
4 sacoches d'une contenance de 4 à 8 litres. Oui, j'ai bien
dit 4 : l'amazone permet en effet de répartir plus de sacoches
que la monte à califourchon : j'y reviendrai plus tard. Mais
attention, l'arme est à double tranchant : l'objectif n'est
pas de transformer notre monture préférée en
mulet : n'oublions pas qu'il nous porte aussi ! 60 kg d'amazone,
10 kilos de selle et encore 15 kg de paquetage, ça fait beaucoup...
Ca fait en tout cas plus que ce que peut prendre un cavalier à
califourchon, qui n'a pas autant de possibilités, comme vous
l'aller voir.
Le paquetage
de l'amazone
Quelques photos sont beaucoup plus parlantes qu'un long discours.
Ma selle d'amazone a été équipée de
5 anneaux à l'arrière, ainsi que d'un renfort aux
2 anneaux du collier de chasse. Ces anneaux sont en laiton, car
au contact des mousquetons, d'autres anneaux ont montré des
signes d'usure.
J'ai imaginé et constitué cet équipement moi-même
car il n'existe rien de prévu pour la monte dans les fourches,
et l'ai testé entre autres dans le Haut Jura, pendant 3 semaines.
Et il est en nylon traité, pas en cuir. Encore une fois,
question de poids, et aussi de facilités pour les travaux
de transformation.
Derrière la selle
: le paquetage classique de cavalier, mais posé plus loin
sur le dos du cheval, alors que normalement, il se positionne sur
la jupe de la selle. Attention, pas sous la selle : il faut que
la colonne vertébrale du cheval reste libre, autant que possible.
Ce paquetage est composé de 2 sacoches latérales et
d'un sac central contenant mon sac de couchage. Personnellement,
j'y niche mon GSM, en sécurité dans les plis du sac,
qui est dans un sac poubelle, à l'abri des coups et de l'humidité
Le paquetage vu du côté gauche, avec la cravache à dragonne.
|
le paquetage vu du côté droit
|
Côté droit
: d'arrière en avant, on voit la sacoche latérale
droite du gros paquetage de derrière, et 2 sacoches supplémentaires.
Ces deux sacoches sont reliées par un même panneau,
et s'accrochent à l'arrière de la selle, et à
l'anneau du collier de chasse devant. J'y ai ajouté des lanières
me permettant d'y accrocher un vêtement ou autre chose. Devant,
on voit la fonte droite, bien remplie, surmontée du petit
étui de l'appareil photo. Au départ, il s'agissait
de 2 fontes classiques. Il y a toujours 2 fontes, mais l'une, la
gauche, a perdu toute son épaisseur, pour se glisser SOUS
le garde-jambe, attachée à l'anneau du collier de
chasse avant gauche. Elle contient uniquement mes papiers, et est
toute plate. Qui irait chercher mes papiers sous mes jupes ?
Côté gauche
: d'arrière en avant, on retrouve la sacoche arrière
de paquetage. Le long de cette sacoche, j'ai coutume de pendre,
juste derrière la jambe, une mince banane qui contient mon
matelas pneumatique, pièce très lourde mais indispensable
à mon confort.
A cela j'ajoute souvent une longe d'environ 8 mètres : ça
peut toujours servir, ainsi qu'une sangle. Il y a aussi les latigos
(les lacets, c'est moins savant et plus commun), indispensables
pour tout, et un stock de petits mousquetons en laiton , pour accrocher
tout et n'importe quoi
Tout ce matériel
est équilibré au gramme prêt. C'est important.
Un cheval qui s'en tire avec une petite plaque sans poils au bout
de 3 jours de randonnée ne fera pas un long voyage si on
n'y prend garde. Pour l'équilibrage de ma selle, paquetage
et amazone compris, j'ai constaté qu'une différence
de 1 kg était idéale. Je m'explique : j'embarque 1
kg supplémentaire à droite par rapport à gauche,
et ma selle s'équilibre sans balancine sous mon poids. Cette
mesure est valable pour moi, avec mon cheval, ma selle, ma taille
et mon matériel. A chacune de voir pour elle-même.
Je précise que mon cheval a été vu par un ostéopathe
avant et après voyage, à chaque fois, et que celui-ci
n'a décelé aucune différence de masse musculaire
entre la gauche et la droite, preuve s'il en est que le développement
musculaire a été harmonieux malgré la monte
dans les fourches.
En voyage, il existe
2 écoles : soit on sangle " bien ", soit on ne
sangle pas du tout. Pour ma sécurité, j'ai opté
pour " bien " sangler la sangle elle-même, mais
ma balancine est lâche. A chacune de faire sa propre expérience.
J'emploie une sangle très large, en nylon tressé,
équipée d'une boucle d'équilibrage. Pas de
sangle en cuir : à moins d'un entretien plus que rigoureux,
il y a risque de blessure dès qu'elle est souillée.
Quand il faut préparer son cheval sous la pluie…
Que prendre ?
Dans ce matériel, c'est l'indispensable des chevaux qu'il
faut caser : trousse de maréchalerie (éventuellement
fers de rechange), trousse vétérinaire et humaine,
matériel de pansage et répulsifs efficaces. Nous ne
nous embarrassons pas de nourriture, à part notre pic-nic
du jour. On n'est pas en Patagonie
Chaussures de rechange : le plus pratique : des petits mocassins
sans talons, en cuir et avec une bonne semelle. Ces chaussures sont
destinées à être portées partout où
l'on n'est pas à cheval, elles doivent être pratiques,
ne pas prendre de place et bien tenir aux pieds.
Les vêtements : vaste débat, vaste sujet, mais
petit espace. Donc, on prend l'indispensable : des sous-vêtements
de rechange facilement lavables, sans lésiner sur la qualité.
Un minimum de 3 paires de chaussettes en coton, pour éviter
les échauffements.
Quelques T-shirts ou des chemises (qui ont l'avantage d'être
multipoches), comme on préfère, du moment que ça
ne doit pas être repassé après lavage.
Si on monte en hiver, le bon vieux collant en dessous du pantalon
a fait ses preuves. Et surtout on pratique la technique de l'oignon
: pas besoin d'un gros pull bien encombrant : il est plus facile
de mettre 2 pulls fins qui au total tiendront plus chaud. Le polair
est pour cela extraordinaire. Un pantalon civil en plus d'un jodhpur
de rechange, ça sert toujours. Un anorak, qui peut se doubler
de polair. Pour tout cela, un tube de savon liquide pour vêtements,
et on fait sa petite lessive régulièrement...
Une fois qu'on a rassemblé
tout son petit matériel, on s'installe à son aise
dans un espace suffisamment grand, avec d'un côté le
matériel et une balance de ménage, et de l'autre nos
sacoches. Et on fait des petits paquets : tous les vêtements
seront emballés séparément ou par sortes, dans
des sacs de congélation grand format avec zip. Ce système
est le seul qui protège efficacement de l'humidité.
Commence alors la répartition,
à partir du pesage, étape indispensable.
Règle de base : tout ce qui va aller côté "
cheval " des sacoches doit être plat, sans angles. Un
exemple : on garnira le fond de la sacoche " vêtements
" avec un essuie, pour amortir les chocs et protéger
le cheval.
Autre règle : tout ce qui est lourd va dans le bas
des sacoches, mais ça, c'est élémentaire !
Petit détail
: on ne fixe rien avec des velcros : d'expérience, je
peux vous dire qu'un bon velcro ne résiste pas à la
traversée d'une forêt de sapins non élagués
(Que faisais-je là, me direz-vous avec raison ? Il s'agissait
d'un itinéraire alternatif et peu probable : un égarement
passager
qui nous a coûté un appareil photo !).
Les élastiques
ne sont pas à conseiller non plus : ils se détendent,
s'usent, craquent
au plus mauvais moment. Par contre, les
lanières d'éperons sont impeccables pour tout attacher
: truc à retenir !
Ah oui, détail
important : on ne fait pas ça 2 jours avant de partir.
On fait ça 1 à 2 mois à l'avance, et on "
teste " le tout sur de courtes escapades de 3 ou 4 jours, avant
le grand départ. Il sera toujours temps d'arranger l'un ou
l'autre détail, mais pas au dernier moment. Cheval blessé
= voyage terminé.
Et puis on pose tout
ça sur le cheval, et on voit ce qui cloche. Idéalement,
il ne faudrait pas que le paquetage soit en contact avec le poil,
ni qu'il y ait du poids sur l'arête dorsale. A cet effet,
j'ai donc bricolé une autre pièce spéciale
: 2 grand tapis navajos, raccourcis à la longueur de ma selle,
avec un débordant devant et derrière pour les fontes
et les sacoches, et cousus ensemble sur 3 côtés, en
laissant l'arrière libre, comme une housse. Et là-dedans,
j'ai enfilé un très gros tapis de selle américain
en feutre, bien long et bien dégarroté, et aéré
par des trous sur l'arête dorsale. Quand c'est sale, il suffit
de laver les navajos, le tapis de feutre est nickel. Jusqu'à
aujourd'hui, je n'ai pas à déplorer le moindre pépin,
touchons du bois !
Pour achever tout ça,
et comme je fréquente tous types de terrains, je ne monte
jamais sans une bricole. Idaho est bridé (sans mors) avec
un hackamore, et porte toujours licol et corde à 2 mousquetons.
Voilà, je crois que j'ai fait le tour
Mes atours
J'adore les jolies tenues d'amazone, et je les collectionne, mais
pas en voyage ! ! ! Foin d'élégance, il faut être
efficace. Donc, pour moi, cela se traduit pas des bottines de randonnée
avec une bonne semelle crantée, et bien graissées
pour ne pas prendre eau. Des mini-chaps bien ajustés mais
pas trop hauts (ça coince au genou), et un tablier de chasse
anglais pas trop serrant (en jeans noir, indéchirable et
inusable, je vous recommande la matière). Je porte souvent
un gilet sans manches (pratique pour les poches surtout), sur chemise
ou T-shirt. Mon couvre-chef m'est indispensable : il s'agit d'un
chapeau australien, en cuir, ultra-léger, et avec une coiffe
en treillis, bien aérée. Par soleil, il m'évite
de ressembler à un homard Thermidor, et par pluie, il ne
fait pas gouttière dans mes yeux. Le détail qui tue
: un latiguo sert de mentonière
Sinon, adieu chapeau
au premier galop
Ce fameux chapeau m'a
valu une chute inoubliable. Que je vous explique : au milieu d'un
joli petit bois, Idaho se tenait sagement au montoir, à côté
d'un tronc. Je reprends ma jupe, saisis les rênes, mets le
pied à l'étrier et
Zouuuuuuuuuu
. En un
coup, je me retrouve brutalement tirée vers le bas, chapeau
enfoncé jusqu'aux yeux
La mentonière s'était
accrochée à la fourche inférieure. Lentement,
sans pouvoir me retenir, je glisse le long de mon cheval, jusqu'à
l'atterrissage tout en douceur et complètement hilare en
dessous d'Idaho. Lui, un peu surpris, fait un pas en arrière,
et m'écrabouille gentiment la cuisse : j'en ai gardé
un très beau tatouage, un peu douloureux : mofif fer à
cheval avec mordax
Les lunettes de soleil
ne sont jamais très loin dans les fontes, mais protégées
par un étui rigide. Idem pour la crème solaire : le
tube d'écran total me suit partout.
En route
Le démarrage : on prévoira une étape courte
: 15 km environ. Il faut que le cheval prenne son rythme, qu'il
sente son paquetage, et puis on a rarement le temps d'entraîner
réellement son cheval. Donc, on entraîne " sur
le tas ", en augmentant la distance et la difficulté
des étapes. A condition de faire ça intelligemment,
tout devrait bien se passer.
Une dame de mes connaissances,
nouvelle convertie à la randonnée, décide de
tenter l'aventure. Elle monte son pur-sang assidûment, et
de jour en jour augmente la résistance du cheval en vue de
son voyage, à allures variées. Celui-ci est au top
de sa forme au jour du départ, du moins le croit-elle
Elle charge les paquetages et
ça s'est terminé
tristement 3 jours plus tard par un retour en van à l'écurie.
La dame avait négligé un détail : le poids
du paquetage sur les reins de son cheval, qui n'a pas supporté
la surcharge et s'est bloqué les reins. Ca n'arrive pas qu'aux
autres
Il faut 3 ou 4 jours
pour se mettre dans le bain. Les 3 premiers jours, c'est encore
l'euphorie et pas encore les automatismes. Et puis il y a la baisse
de forme : la journée où tout va mal. Le dadou est
de mauvais poil, il y a une sangle cassée, on se demande
dans quelle galère on s'est embarqué, on a mal partout
et monter ne fait qu'empirer les choses
On rêve de
son lit et on maudit la terre entière. Et le lendemain, miracle
: là, on est vraiment parti : on peut voyager une semaine,
un mois, un an
Tous les soucis quotidiens
sont envolés, on prend la vie au jour le jour, et on en profite
A l'identique, à la fin de la randonnée, les 2 derniers
jours, c'est désagréable parce qu'on a aucune envie
de rentrer et de retrouver le quotidien : toute l'équipe
est dans le voyage et veut y rester.
Le rythme de la journée.
Nous la divisons, d'après la distance, en 2/3 le matin, une
halte à midi et 1/3 l'après-midi. Nos montures sont
désellées et laissées en longe ou en liberté,
de quoi faire le plein d'herbe fraîche à midi. En général,
ils mangent leur comptant, et se reposent près de nous
Pour les encourager, une friandise les attend avant le départ
d'après-midi. On a bien droit à un dessert, non ?
? ?
Idaho est très curieux : « Qu’est-ce que tu manges
? »
Pour les allures, cela
dépend du terrain
En général, on marche,
on marche, et on marche encore : un bon rythme, souple et soutenu,
un peu plus rapide que la marche à pied : il faut compter
faire au maximum de 5 km/heure. Plus, c'est de l'ineptie, ou de
l'endurance (biffez la mention inutile).
On n'oublie pas qu'on
est en vacances, et qu'on en profite ! Inutile d'arriver avec les
reins cassés, crevés, et le dos en compote. Enfin,
c'est ma philosophie
Vous faites ce que vous voulez ! ! !
Un bon moyen pour évaluer
la forme des dadous : la demande d'un petit galop gentil, en terrain
facile et en fin de journée. Si ça démarre
au quart de tour, moral et physique sont bosn. Sinon, il faut faire
attention.
Les jours de repos,
plus utiles pour les cavalières que pour les chevaux, qui
sont en pleine forme et n'en ont visiblement pas besoin : tous les
5-6 jours, c'est bien. On peut faire sa lessive, mettre de l'ordre,
voir vivre les chevaux, profiter des curiosités du pays,
se reposer
Deux petits chevaux bien musclés, prêts à affronter
les dénivelés du Jura
Ici encore, il existe
plusieurs options : soit on rallie les étapes à allures
plus rapides et les chevaux ont besoin de jours de repos, soit on
progresse plus doucement et régulièrement, et les
chevaux vous emmènent au bout du monde. C'est comme on le
sent. Souvent, la nécessité commerciale de chevaux
de location mis à disposition de cavaliers avides de sensations
fortes induit la première proposition, avec allures et sans
paquetage. Nous, nous partons avec nos chevaux personnels, ce sont
nos compagnons d'aventure : nous partons à 4 ou à
5, et chacun, cavalier ou cheval, a son mot à dire. Nous
ne partons pas à 2 cavalières et une cavalerie. C'est
une autre manière d'aborder les choses, et ce n'est pas possible
pour tout le monde
Parlons vie courante,
et contraintes horaires. Eh oui, ce n'est pas parce qu'on est en
vacances qu'il faut faire grasse matinée
Enfin, si
vous voulez arriver à l'étape du soir, bien sûr
! En général, on essaye de ne pas aller dormir trop
tard, mais ce n'est pas toujours évident. Nos hôtes
d'un soir sont souvent intarissables. Ouiche ! Sauf que nous, après
7-8 heures de selle, on tombe de sommeil. On évite aussi
d'abuser de la boisson ou d'un repas trop copieux : être malade
en voyage, ça n'a rien de drôle... Et on se lève
dès potron-minet : les hôtes sont fatigués et
dorment encore : on a tout loisir pour s'occuper des chevaux pour
partir avant les chaleurs du jour, frais et dispos pour de nouvelles
aventures...
Spécificités
du terrain par rapport à la monte en amazone
Je serais tentée de dire qu'il n'y a aucune différence
à faire entre une amazone et une cavalière. C'est
certainement à l'amazone de savoir se débrouiller
pour ne pas avoir donner l'air d'être " la petite madame
délicate " qu'on hésite à accompagner.
Donc, on perfectionne son autonomie : on se débrouille pour
arriver en haut de sa selle, et tant pis si ce n'est pas académique
: les écureuils ne feront pas de commentaires, promis !
Les allures ne posent
aucun problème : toutes les amazones savent ça. Un
petit obstacle naturel fait aussi partie du décor courant.
Donc, la consigne quand on est amazone et qu'on voudrait partir
en voyage : être à l'aise aux trois allures et en extérieur,
en plus d'être débrouillarde.
De passage chez une connaissance…
Je suis un très
mauvais exemple pour épargner mon cher cheval : en effet,
des difficultés à marcher font qu'en forte montée,
il me sert de remonte-pente, quand je ne reste pas dessus. En descente,
par contre, je n'hésite jamais à mettre pied-à-terre,
surtout s'il s'agit de macadam. Cependant, il peut parfois être
plus prudent de rester à cheval, question d'équilibre.
Autre solution plus radicale : tout le monde à pied, et le
cheval totalement en liberté : c'est chose courante en pays
de montagne.
J'ai souvenir d'un
superbe chemin muletier en Basses Pyrénées : nous
étions descendus de nos montures sur conseil de notre guide,
et nous descendions à pied une pente très très
raide et fort caillouteuse. Les chevaux marchaient plus vite que
nous. Arrivés en bas avant nous, ils nous attendaient tranquillement,
et nous n'avons plus eu qu'à remonter en selle.
Dans le Haut Jura, du
côté de la Rixouse, notre halte nous attendait, gîte
blotti au fond d'une très jolie vallée. La route asphaltée
pour y accéder descendait comme sur un toit, et ça
glissait, ça glissait, pendant 3 km... Nous avons fait ces
3 km à pied. Les chevaux allaient très bien, merci,
mais nos genoux étaient en feu à l'arrivée
! ! ! Quel souvenir
Le départ du lendemain matin ne
fut guère plus glorieux : il a fallut tout remonter !
En rentrant du Jura, nous avons eu la surprise de trouver au courrier
la lettre d’un de nos hébergeurs, Francis Baron, à Crenans. Journaliste
à ses heures, il avait envoyé un petit article nous concernant au
quotidien « Le Progrès ».
Le départ et
l'arrivée d'une journée se font à pied, selon
le même principe que pour tout autre exercice. Nous sellons,
bridons, et nous mettons en route. Après quelques minutes
de marche, on trouve un bon montoir, on ressangle, et on se met
en selle. Au sujet du montoir, ce n'est pas réservé
qu'aux amazones : les cavaliers en profitent autant que leurs chevaux
: ce n'est en effet pas excellent pour le garrot et le dos d'être
tirés brutalement et toujours d'un même côté
au moment de la mise en selle. Qui plus est, comme en randonnée,
on a l'habitude de ne pas sangler très fort, le montoir s'avère
vite indispensable. L'amazone ne sera donc pas l'exception qu'on
devra attendre
Petite histoire de montoir,
arrivée à l'une de mes amies, apprentie amazone qui
nous accompagnait en extérieur. Son cheval était très
calme, mais elle manquait de souplesse et d'assurance. On lui trouve
un montoir bien haut : un tas de bûches, un peu branlantes,
certes, et humides de pluie, mais bon
Je la précède
et tout se passe bien. Elle veut me suivre, arrive péniblement
sur LA bûche qui glissait, opère un demi-tour périlleux,
se redresse, rassemble ses rênes, glisse un peu, se rattrape,
prend son tablier, avance un pied, le remet précipitamment
parce que " ça bouge ", se tortille, cherche une
autre bûche d'appui, recommence, etc
Quand enfin elle
tend son pied vers l'étrier, son brave cheval qui pendant
5 minutes n'avait pas bougé un cil , opère tranquillement
un quart de tour ! On a tous éclaté de rire, y compris
l'infortunée
A l'arrivée d'une
étape, même chose qu'au départ. On met pied
à terre un peu avant, ne fusse que quelques mètres
et on dessangle d'un trou. Libérer un peu le harnachement
fait qu'il masse doucement la musculature du dos du cheval avec
le mouvement de marche. Ensuite, à la halte, on va pouvoir
tout à loisir déshabiller le cheval et vérifier
que tout va bien.
Autre petite chose qui
nous semble aberrante : donner à boire dès l'arrivée
d'une étape, et ne pas laisser le cheval boire dans les flaques
(enfin, pas n'importe quelle flaque : nous évitons les flaques
entre terrains de cultures, car on y trouve des traces d'engrais).
Souvent, en voyage, nous ne connaissons pas ce que le terrain nous
réserve, donc toutes les occasions sont bonnes pour abreuver
les chevaux, y compris les flaques d'eau. Nos chevaux sont assez
" instinctifs " que pour ne pas boire ce qui n'est pas
bon pour eux. Les priver d'eau pendant l'étape et les laisser
s'abreuver en un coup, juste après l'effort, à l'arrivée
de l'étape, peut les rendre malades, tout simplement.
Idaho et Ysbrand s’abreuvent à une fontaine de
village…
La douche : sujet controversé.
En ce qui nous concerne, nous ne douchons que rarement nos chevaux.
Parfois, nous douchons les membres, en douche baveuse, s'il fait
vraiment chaud, ou si une situation critique le demande : suspiccion
de blessure, boue excessive, jambes enflées...
Photo prise lors de notre périple en Belgique pendant
25 jours, Ysbrand sortant de la douche, brillait sous le soleil,
avant qu’on le réemballe dans sa moustiquaire.
Après discussion
avec vétérinaire et ostéopathe, il ne nous
semble pas opportun de doucher, au jet violent et à l'eau
froide, des muscles qui sont encore échauffés. L'effet
peut être très néfaste : blocage des reins ou
crise de tétanie par exemple. Nous préférons,
lors de la journée de halte, prendre le temps de bichonner
nos montures, et leur administrer une douche tiède et baveuse,
qui fera partir la transpiration des jours précédents
et les délassera réellement, sans leur faire de tort.
De même pendant
ce jour de repos, nous sellerons nos montures et irons balader une
heure ou deux : on arrête pas l'athlète en plein effort,
et nos chevaux sont de vrais athlètes. Ce jour de repos,
ils le passeront aussi en pré, bien sûr. Pas question
de les laisser enfermés, sous peine de récupérer
des chevaux à la limite de la lymphangite !
Pas vraiment besoin de courir au fond d’une prairie
pour attraper ces deux loustics…
Eh bien voilà
: quelques pages que j'ai pris énormément de plaisir
à écrire, non pour prouver un savoir quelconque mais
pour vous faire partager mes quelques expériences d'amazone
d'extérieur, en espérant que cet article incitera
l'une ou l'autre d'entre vous à tenter l'aventure. Le voyage,
ce n'est pas bien compliqué, il suffit de s'y lancer, avec
prudence et bon sens. Si cela vous fait rêver, n'hésitez
pas, cela en vaut vraiment la peine. Le voyage, c'est une impression
de liberté à vous couper le souffle, une complicité
à nulle autre pareille avec son cheval, à la portée
de chacun. Il suffit de le vouloir.
Vous avez dit « sérieux » ? Vous en connaissez,
des chevaux qui font du cheval-stop ?