AOUT 2006

mon beau tournesol...

La douleur


Ce n'est pas franchement un sujet que l'on aborde au mois d'août, mais pour moi il est hélas d'actualité.
Comme vous le savez depuis le mois de juin, les ennuis s'accumulent, après la fourbure d'Hidalgo dont vous pouvez lire le journal sur le site. J'ai personnellement été foudroyée, le terme est vraiment exact, par une sciatique paralysante.
Après examens et maintes visites chez les médecins et spécialistes, le diagnostique est pessimiste, une volumineuse hernie en L4 L5 touche le nerf sciatique. Je ne vais pas rentrer dans les détails de cette maladie mais depuis deux mois, elle me pourrit la vie.
Il y a deux sortes de douleurs, l'agressive et négative et la positive…. Comment ça une douleur positive ???
Mais oui et c'est nous les femmes qui en bénéficions, évidemment si c'était pour les messieurs il y a déjà bien longtemps que l'on aurait trouvé une médication, mais voilà les douleurs de l'accouchement même les plus terribles apportent un bonheur, et celles là sont bien les seules que je qualifierais de positives, vous me direz qu'il y a la péridurale, après 11 h de vrai travail pour mon aînée, j'en ai bénéficié, elle a été ratée et pour la naissance de ma deuxième fille, je n'ai pas voulu qu'on m'approche avec une seringue pendant tout le temps du travail et à quoi je pensais ? Aux animaux ! Mais oui, elles aussi accouchent dans la douleur et le silence, moi j'ai fait l'impasse sur le silence mais en 5 h, hop le bonheur était au rendez-vous, c'est la seule douleur acceptable à mon avis.

La douleur, on a tous eu un jour ou l'autre mal aux dents, pensez à ce minuscule nerf que l'on ne peut voir qu'avec une loupe et qui nous fait souffrir l'enfer tant que le dentiste n'est pas intervenu… et là le nerf à la taille d'un petit doigt et il court de votre disque en L4 jusqu'à vos orteils…
La petite sciatique, beaucoup l'ont eu déjà, même certains dont je fais partie, continuaient à monter à cheval et c'était même un soulagement, le poids des jambes étant mieux réparti et surtout pas de retour puisqu'il n'y a plus de contact avec le sol.
La sciatique paralysante paralyse certes mais surtout c'est une douleur permanente, des élancements jour et nuit, des crampes 4 à 5 en même temps et qui durent des heures, les os qui brûlent et j'en passe. La douleur, tout le monde en parle, les médias annoncent victoire avec les Centres anti-douleur, oui mais il y a des conditions, et la sciatique comme très certainement d'autres maladies y échappe, il n'existe pas de médicaments miracles. D'ailleurs pour la petite histoire, lors d'une de mes rares sorties au rayon légumes, une dame m'a regardé, j'étais toute tordue cramponnée à mes béquilles, elle a dit : " pas de bandage, pas de plâtre, et le masque de la douleur sur le visage, ça c'est une sciatique paralysante " j'étais surprise mais elle a tout de suite su, car elle avait eu, elle aussi cette chose ignoble et elle a mis 3 mois à s'en sortir. Deux autres personnes ont fait presque la même chose, elles m'ont demandé ce que j'avais et m'ont raconté leur propre expérience qui en un mot était douleur douleur douleur et pas de médicaments... On peut opérer, mais il faut d'abord essayer de voir si la hernie peut diminuer d'elle-même et l'attente est … un enfer. Les nuits sont sans fin, avec en prime l'angoisse, se faire ouvrir le dos n'étant pas un avenir très agréable à envisager, espérer guérir tient du miracle quand on est littéralement dévoré par la souffrance.
Du coup, je pense, je réfléchis sur ce que j'ai fait, ce que je voudrais faire et ne peux rien faire pour l'instant, je me sens abandonnée par la médecine, bien que le spécialiste m'ait dit que j'en avais pour 6 mois au mieux, même si les kinés disent que tout ça c'est normal, moi je dis et je répète que non, il ne pourra jamais y avoir de normalité dans la douleur.

Quand vous avez eu un accident ou une maladie qui vous apporte souffrance et malheur, vous ne pouvez pas en vouloir à personne de physique, vous détestez ce qui vous arrive et ça empoissonne aussi votre moral. Vous ne pouvez pas jeter votre amertume et votre colère sur la cause, histoire de décompresser un peu toute cette tension, cette amertume qui envahit vos muscles, vos os et votre cerveau, cela ne résoudrait pas le problème mais au moins cela n'aggraverait pas la situation déjà intenable.

Je pense à mon cheval Hidalgo qui a débuté sa fourbure une semaine avant ma sciatique, nous avons été compagnons de douleur pendant 5 semaines, lui dans son enclos de 12 m de diamètre et moi installée dans mon transat à 4 m de lui. On s'est tenu compagnie, j'ai avec beaucoup de courage et d'amour pour lui, fait ses soins journaliers et il me l'a bien rendu en étant admirablement gentil, doux et obéissant. Il ne fait aucun doute que lui aussi savait que je souffrais et que nos douleurs étaient bien de la même violence, puisqu'il est resté une bonne semaine couché sur le flanc pour soulager ses pieds.
Quand il a été mieux, je l'ai relâché au parc avec El Gato, il ne voulait pas s'éloigner de moi, et cette séparation qui était positive pour lui, n'a pas eu la joie voulue de la guérison. Compagnon de douleur nous avons tissé d'autres liens différents dont on se serait bien passé certes mais qui prouvent s'il le fallait que les animaux sont attentifs à nous et sentent nos émotions intérieures mieux que n'importe qui.
Mes 3 chattes se sont relayées pour me " couver " soient les 3 soit une par une, je n'ai jamais été seule, avec 37° à l'extérieur cette preuve d'amour était difficile à supporter mais impossible à éviter, tant d'amour gratuit quand on a son propre corps comme ennemi, on prend.

Au fils des heures surtout nocturnes, où l'intensité de la douleur est à son maximum, je pensais à ceux qui la donne. Comme je le disais l'accident et la maladie ça vous tombe dessus et vous ne pouvez que subir !
Mais il y a des humains qui donnent la douleur, et qui en prennent du plaisir. Du fond de mon lit, je commence à éprouver un sentiment de plus en plus fort et négatif à leur égard.
Comment peut-on torturer des êtres vivants juste pour faire mal ?
Comment cette ignominie est elle le propre de l'homme ?
Les guerres, je ne parle pas de passé, puisque au JT, tous les jours nous avons de belles preuves de souffrance, de plaies, de douleur, les images d'êtres humains en pièces détachées qui vous font dire que par moment la mort serait une délivrance…
Des enfants maltraités pendant des jours, des semaines, des mois dans l'indifférence des adultes vivant autour d'eux.
Des animaux en laboratoire qui sont juste des cobayes, qui souffrent avec des pics plantés dans le crâne, des cancers déclenchés pour le bien des hommes…. la bonne blague, en l'an 2006, au XXI ème siècle …. Plaisirs morbides de l'homme moderne.
Les corridas et les courses de chiens ou de chevaux, coutumes du passé, où l'on plante des pics dans le garrot d'un taureau, où l'on cloue le lévrier perdant à un arbre mais vivant bien sûr, les courses de chevaux poussaient à leur maximum à faire exploser une artère, le cœur, à briser un membre, douleur gratuite, douleur pour le plaisir, comment ça fait de voir quelqu'un se tordre de souffrance, ce
voyeurisme propre à l'humain…
Et toute cette cruauté dont la liste est si longue que je ne l'écrirais pas. Mais à ces tortionnaires, j'aimerais leur donner une journée de ma vie présente, ce n'est pas de la méchanceté et encore moins du voyeurisme, mais juste pour leur faire connaître et vivre de près ce qu'ils donnent si facilement sans connaître la monstruosité de leur acte.

Je ne veux pas finir sur une note négative, et je pense à ma fille Amélie qui a mené deux ans durant un long combat contre la douleur pour son genou et a subi deux opérations, je pense aussi à mes amies comme Véronique, Kiki, Denise, Anne P. et tous les autres qui ont vécu eux aussi des moments de souffrance et de douleurs suite à des accidents, ils ont mené avec courage leur combat et aujourd'hui ils sont mes modèles, je me cramponne à leur courage et leurs paroles de réconfort pour mener mon propre combat pourtant si souvent bousculé par le doute…
Mais si par bonheur, je m'en sors un jour assez vaillante, je vous jure que je mènerais un autre combat bien plus long et bien plus dur contre la douleur des autres, de ceux qui n'ont pas la parole, enfants ou animaux pour se défendre. Mieux que jamais je sais maintenant, je comprends et compatir ne suffit pas, il faut absolument protéger et défendre les victimes, ce qui ne m'empêchera pas de continuer à m'occuper des enfants malades à l'hôpital et d'essayer de leur apporter une pause par le rêve et le cheval dans leur détresse.