Quel est le pire cauchemar du propriétaire de chevaux qui vivent en extérieur ?

….

C'est de trouver le pré vide !!!

 

ou Laurel et Hardy en fugue majeur


A 6 h 30 du matin, première visite aux chevaux et ration. Comme tous les matins, c'est Gabriel qui s'y colle avec Unix (notre boxer), qu'il pleuve, qu'il neige, qu'il fasse nuit, ou qu'il fasse simplement beau, ce rituel est immuable. Le parc est à 200 m de la maison, quoi de mieux que cette ballade matinale pour le " pissou " d'Unix, et la joie de donner à manger aux " gros " (El Gato et Hidalgo).

El Gato nous guette toujours, et à 100 m il hennit déjà.
Ce matin là, rien, silence.
Encore un peu endormi, Gabriel reste confiant, ils doivent être en sous bois, il remplit la mangeoire de foin, donne la ration du papy, El Gato a 30 ans, et plus toutes ses dents, du coup il a droit à une sorte de soupe matin et soir.

Mais le silence se fait pesant, il appelle encore et encore… pas de réponse.
De mon côté, je commence à voir tourner les aiguilles de l'horloge trop vite, on va être en retard au boulot et 30 mn plus tard, je vois arriver soufflant, crachant, hors d'haleine, un mari déconfit : " les chevaux ont disparu !!! "

Je n'arrive pas à savoir si mon sang se glace ou se met à bouillonner, le cerveau lui s'active, les scénarios s' enchainent : cheval éventré sur une voiture, cheval qui saute de la falaise à 1 km d'ici, cheval mort, cheval coupé en rondelles et encore et encore…
On vire le pauvre chien dans la maison, il est cardiaque pas la peine d'en rajouter, je courre aux licols et au fameux seau, le seau " attrape couillons " avec du bon grain.

Je sors la voiture, Gabriel reprend le sentier avec le seau et une corde, moi je roule toutes vitres baissées dans tout le quartier, mes chevaux sont dressés à une sorte de cri de sioux, ben oui quand je siffle, il n'y a que mes orteils qui l'entendent du coup mon cri (RRRRRRRRRRRRRi) est persan, d'autres chevaux y répondent mais pas les miens.
Dans les livres on dit que les chevaux qui s'échappent vont vers leurs congénères, ou montent…. Mes chevaux n'ont pas lu ces livres et comme on dit… ON c'est un .ON !

Le quartier s'allume car il fait nuit noire bien évident, dans le scénario " terreur à la Tour sans venin " fallait bien qu'on n'y voit rien à 1 m. Je retrouve Gabriel au parc, il a fait le tour mais rien, on largue la voiture dans un coin et on repart, les recherches sont infructueuses… on se " re " sépare, il va descendre plus bas et moi je vais voir les voisins.

Monique et Jean Paul m'accueillent et me prêtent leur téléphone, j'appelle les gendarmes au cas où il y aurait un appel ou pire un accident… une femme me répond qu'il faut rappeler à 8 h, la gendarmerie est fermée…. ENORME, sacrés fonctionnaires va ! Messieurs les bandits n'oubliez pas de 17 h 30 à 8 h du matin, vous avez la voie libre, la fonction publique n'est pas là pour nous protéger…. Et encore moins pour nous sauver.


Bref, alerte générale dans le quartier, et je ressors, là j'entends des sabots…. Et mon pauvre mari, soufflant comme une forge, tirant le " papé " super cool au bout de sa longe avec le mulet (Hidalgo) qui suit comme toujours…
Gato me voit, il a une minute de confusion, style : " oups la boulette !!!)
C'est 7 h 30 et un halo de fumée sort au dessus de ma tête, encore en chemise de nuit sous mon pull et mon jogging, je fume, je suis en nage et il fait 2°, chercher l'erreur.

L'envie de les découper en rondelles, dans faire de la soupe me démange, non non faut pas mentir, oui je suis super contente que tout ce petit monde soit vivant, mais la peur qu'on a eu et qui me broie les boyaux, non non messieurs les crétins des Alpes, vous allez payer… oh pas de coups de bâtons, indigne de tout être qui se dit de respecter les autres mais une punition …. disons psychologique ira très bien.

Gabriel m'explique qu'ils ont entendu mon cri, et qu'ils revenaient gentiment, clopin clopant sur le sentier, ballade que l'on a fait pendant des années et des années et dieu merci sans aucune route autour.
Il m'a dit avoir pensé à Laurel et Hardy, le vieux rusé, et le gros béta…

Gato, tout content, fonce à sa mangeoire, mais il me reste un peu d'énergie, même beaucoup, et je le devance pour lui enlever sous le nez, la bonne souplette de mémère et d'1.
Puis ils attaquent au foin, que nenni mes jolis, armée de ma fourche, et en moins de temps qu'il ne faut pour le dire, le foin réintègre la réserve et de 2
La clôture électrique est bouclée sur le petit par et donc la terre, pas un brin d'herbe et de 3.

On part bosser, mais je reviens à 13 h les chéris attention !

Au retour, je n'ai pas décoléré, en 27 ans, c'est la première fois qu'ils fuguent, on a fait rapidement le tour et tout était bien fermé ou presque, à un endroit la clôture a été écrasée par les ronces et donne sur un muret surplombant le chemin…

C'est à 30 ans, en retraite complète, que notre vieux cheval joue les filles de l'air, en pleine forme, il s'ennuie et du coup pourquoi pas enjamber la clôture, on a retrouvé les traces, Hidalgo est bien trop " timide " pour faire ce genre de chose, par contre il suit son chef. Et las de rester percher sur le muret, ils ont sauté et mon gris est raide boiteux… ben voyons, à ça on ajoute qu'ils ont mangé toute la nuit l'herbe interdite d'automne, la plus dangereuse qui soit avec le fructane….

L'après-midi, j'emmène les chevaux à la maison mais toujours à la diète, je leur donne à chacun du bicarbonate, son effet laxatif aidera peut-être à éliminer plus vite la " bringue " de la nuit. Mais ça ne me contente pas, leur superbe m'énerve, du coup les ciseaux entrent dans le jeu, et je fais de belles queues et coupent les crinières à la punk pour Gato et rasée pour Hidalgo.

Hidalgo s'en moque, il n'est pas très coquet mais l'ancien fait la gueule, je savais que je visais juste, tous les 2 ans, je lui faisais une coupe, qui le faisait déprimer mais c'était pour avoir une plus belle crinière aux beaux jours, depuis 5 ans, il avait gardé ses longs crins, et quel travail entre la boue et tout le reste, du coup, je me simplifie la vie, et lui … il n'a qu'à faire la gueule….ça l'occupera un peu, cruelle que je suis …. !!

Depuis cet été, on s'est aperçue de la chute de ses dents, et les pauvres 3 semaines de chaleur l'ont fait terriblement maigrir, à force de vitamines, compléments minéraux et bonnes rations, il a repris de l'état. Au point, où les voisins pensent que c'est Hidalgo qui est le plus vieux, et ne comprennent pas qu'on ne monte plus El Gato.
cet été

en octobre

Pour moi, il est évident, que même si mon cheval est beau, et chose rare sans un poils blanc pour son grand âge, il a 30 ans et on ne monte pas un vieillard, c'est impensable voir cruel.
Le risque d'AVC, ou crise cardiaque est permanent, ça lui arrive quand il fait le fou dans son pré, et bien c'est la loi de la nature, mais si jamais ça devait arriver quand moi, je suis dessus : je serais la coupable, j'aurai tué mon cheval.
C'est quand même très facile de s'arrêter avant, et de lui offrir une vraie retraite.
Bien entendu, il n'est pas sénile comme le sont les vieux humains, son cerveau va toujours aussi bien, et du coup, il fait ce qu'il n'a jamais fait, suite à une éducation que je peux qualifier de parfaite, il s'autorise à faire des bêtises de poulain…à moi d'assumer cette bonne santé comme le dit mon époux.

Samedi, on a refait la clôture bien haute, bien propre.

El Gato veut dire le chat en espagnol, car il se déplace avec la souplesse et le silence d'un chat, mais on pourrait aussi l'appeler " Zorro " le renard, il est futé... comme un troupeau de renards.

Cela fait deux jours qu'il pleut des seaux, et du coup, notre renard a un imperméable, la cerise sur le gâteau (avec ou sans jeu de mots), moi ça me rassure, il sort sans cesse de l'abri, et comme il a beaucoup de poils, il devient éponge et pour éviter qu'il prenne froid, je n'ai pas eu de scrupule, l'imper c'est bien.
Mais pour lui, on dirait qu'il a honte et n'ose pas sortir, mais comme chacun sait un vieux cheval a des intestins très fragiles et l'immobilisation peut être mortelle, une nuit au box et on peut avoir des coliques, à cet âge là, elles seront fatales.


Du coup, la solution du manteau et à volonté faire ce qu'il veut c'est le mieux. Hidalgo aussi a une couverture imper, mais méfiant il a bien regardé ce que je faisais à Gato, et mon " sauve qui peut " a pris la poudre d'escampette " dès qu'il a compris mon intention, au fond du pré, j'avais l'impression qu'il me disait, non pas moi !!! Hidalgo a notre grand malheur à lui et à moi, a une couverture naturelle de graisse, il est plus jeune et craint moins le froid… en plus il a peur quand ça vole un peu… donc on va le laisser tranquille et ce soir, je verrais si Gato a respecté le matériel…

quand la pluie s'arrête on enlève enfin la couverture

trot et galop

Avoir un vieux cheval demande beaucoup de travail, contrairement à ceux qui les oublient au fond d'un pré, pensant faire une BA.
Mais quand on est normal, on soigne son cheval vieux ou pas, comme un être qui demande du respect, qui doit vous respecter aussi, et surtout on veille à éviter les problèmes, il est vitale de prévenir car il est rare de guérir à 30 ans et plus…