EQUITATION SENTIMENTALE

 

SOMMAIRE EQUITATION SENTIMENTALE

 

LE MORS : UN VRAI CASSE TETE

C'est un des instruments les plus anciens qui a traversé les siècles et aujourd'hui encore on en invente de nouveaux modèles plus jolis, plus durs, plus complexes ET INUTILE.


Une jeune cavalière m'a demandé de l'aider à trouver un bon mors pour son pur sang… et elle m'a sorti quelques photos de mors dont je n'imaginais pas l'existence et me voilà dans l'embarras. A quoi servent tous ces mors… ?

 


On est dans la grande mode de la monte sans mors, de la liberté. Pourtant, moi j'ai toujours pensé qu'il fallait apprendre l'alphabet, puis à lire et enfin jouer une pièce de Molière. Le mors c'est pareil, on apprend avec le plus gentil mors s'il existe, à son cheval l'obéissance soit l'alphabet, puis la lecture soit la compréhension des ordres qui vont avoir plusieurs moyens de transmission le mors (les mains), mais surtout l'assiette, les jambes et pour moi la voix. Enfin quand tout cela est bien acquis, on peut si le caractère du cheval si prête, supprimer lorsqu'on monte à cheval l'un de ces éléments, qui est le plus désagréable soit le mors. Mais ce n'est pas le but de tous les cavaliers, il faut donc avoir un mors bien adapté à son cheval, son caractère, la conformation de ses mâchoires et de sa tête avec un filet propre et bien réglé, et naturellement adapté à la discipline que vous voulez pratiquer avec lui, l'horreur de voir ces cavaliers à l'obstacle qui mettent des freins énormes par l'intermédiaire du mors, et qui éperonnent comme des forcenés… faut savoir ce qu'on veut, le travail sur le plat est la seule solution pour apprendre à un sauteur cheval ou humain à respecter l'autre.

Mais pour en arriver là, remettons nous en mémoire certaines choses comme la bouche du cheval. La fameuse barre où l'on place le mors, les gencives si fragiles et sensibles, la langue qui va être coincée sous cette chose en acier, vous souvenez vous de votre appareil en orthodontie ? vous souvenez vous de vos débuts à cheval, avec vos mains qui naviguaient dans tous les sens suivant vos nombreux déséquilibres, la chute ? pendu aux rênes arrachant un cri de douleur au malheureux cheval … mille excuses un cheval ne peut pas crier sa douleur pourtant elle est bien là, et vous ne l'avez pas fait exprès, on le sait tous.


Mais voilà 2 chemins à suivre, celui de l'éducation du cheval et celui de l'éducation du cavalier, pour moi un mors c'est une arme, comme le disait si bien mon colonel, la bride (soit 2 mors) peut être un rasoir dans les mains d'un singe. Les cavaliers ne savent pas respecter le cheval et sa bouche, du coup on voit un panel de mors plus terrible les uns que les autres uniquement parce que les soit-disant dresseurs ne prennent pas le temps de faire l'éducation du cheval tout comme les moniteurs qui n'ont pas le temps eux non plus de faire l'éducation du cavalier.
Dans le meilleur des mondes, il faudrait mettre un licol aux chevaux de club qui doivent être monter par des débutants, et mettre des œufs crus dans les mains de certains cavaliers pour qu'ils se rendent compte de leur brutalité… car comprendre serait la solution. Prendre le cavalier pour un idiot et le laisser se pendre aux rênes au risque de blesser ou blinder la bouche du cheval n'apportera pas cette finesse et ce tact que l'on devrait voir dans chaque équitant. Un modèle du genre, les courses de trotteurs montés, une véritable honte et un panel de ferraille sur la tête et dans la bouche des chevaux tout à fait scandaleux, mais le temps c'est de l'argent, et leur priorité n'est absolument pas le tact, l'intelligence et le respect pour les chevaux.

La première règle d'or, c'est de mettre un mors propre dans la bouche de son cheval… déjà là on aurait 10 pages à écrire, car si en été, cette pratique ce fait assez facilement en même temps que la douche du cheval. En hiver sous prétexte du froid, de l'eau qui est coupée à cause du gel, de ci de ça, les mors sont totalement oubliés, aimeriez vous manger avec la même fourchette tous les jours sans la laver… ou pire prendre celle de votre voisin avec des trucs collés dessus… première règle la propreté.


La deuxième règle d'or, chaque cheval doit avoir son propre mors. C'est aussi personnel que votre culotte et je n'irai pas plus loin dans la comparaison.
Maintenant quel mors ?


Commençons par le début, un poulain ? il faut donner du plaisir au poulain et non pas le " violer " en lui fourrant dans la bouche un truc froid, épais, qui pince, qui pique le palet, bloque la langue, tape dans les dents, souvenez vous de l'appareil d'orthodontie, pourquoi imposer cet objet et ses contraintes sans lui donner un petit goût de plaisir. Moi je mets dès 6 mois, un mors de poney avec du miel dessus, juste un montant de filet, rien qui bloque, le poulain mâchouille ça comme un jouet qui a bon goût, certains préfèrent le réglisse, toujours à petite dose… et pas plus de 5 minutes, comme il a déjà appris à rester à l'attache avec un petit licol, je le brosse, je le papouille et c'est tout, je ne demande rien avec ce mors, c'est juste un "bonjour nouveauté".


Et pas tous les jours, une fois par mois, vous allez être surpris de voir votre poulain prendre le mors avec plaisir, cela se fait très bien pendant les séances de pansage, dès 3 mois, vous apprenez à votre poulain à être attaché pendant 5 mn pour être brosser, pour prendre les pieds, à 6 mois vous lui mettez ce mini mors, à 1 an, il peut garder le mors et être gentiment longer au licol, si vous avez suivi une éducation avec ma méthode, vous pourrez continuer à longer au licol. Mais si vous le débutez avec un poulain que vous venez d'acheter et qui n'a pas été manipulé ainsi, vous vous apercevrez qu'il n'y a pas de frein, ni de direction, et que la force d'un poulain est surprenante, tout gentil qu'il est, même un shetland peut vous trainer facilement sur le ventre s'il a décidé de suivre son idée et non la votre. Partisane de la non violence, il va falloir trouver un moyen de contention et nous voilà de retour avec le mors.

L'hypocrite voudrait que l'on dise, " mon dieu non on ne tire jamais sur la bouche d'un poulain ou d'un cheval " hélas c'est faux, arrêter une force pure de 100 kg ou de 500 kg, il faut un endroit sensible et vite compris du cheval pour qu'il voit la différence entre le confort et l'inconfort. Mais une fois que c'est acquis, on doit respecter et utiliser le mors à bon escient et surtout en finesse. Pour les poulains le mors chantilly est parfait, loin de moi l'idée de lui mettre un mors américain ou d'attelage, même si c'est un comtois que vous éduquez. Un vrai chantilly creux, léger fera son travail d'éducation sans crainte de faire de graves dégâts mentalement et physiquement.MORS CHANTILLY A CANON CREUX mettez des flasques pour éviter les pincures des lèvres


Les espagnols qui ne sont pas réputés pour leur douceur, préfèrent le média cane, sorte de peigne en fer qu'ils mettent sur le nez du cheval là où le cartilage est fragile, et le média cane mord les chairs dès qu'il y a un mouvement contrariant le cavalier, la bouche est sauve certes, mais regardez bien le nez de tous ces beaux ibériques et toutes les bosses et cicatrices représentant les fractures du cartilage…

média cane mors vaquero

Puis pour remercier l'animal, le mors vient en plus, et les mors espagnols sont avec les américains les durs qu'ils soient. Si vous avez un doute, un très célèbre spectacle fait le tour de la France, où les 4 plus grandes écoles font leur show.
Tous ceux qui ont assisté à la prestation du Cadre Noir de Saumur, de l'Ecole de Vienne, de l'Ecole Portugaise d'Art Equestre de Lisbonne et l'Ecole Royale Andalouse de Jerez peuvent voir l'immense différence qu'il y a entre toutes ces écoles.


Des mors, vous en voyez de toutes sortes, pratiquement en bride (2 mors), et bien pensez mains et regardez, la finesse des aides et des mains hyper respectueuses des écuyers de Saumur, suivis de très prés par ceux de Vienne et puis il y a les autres, qui font une démonstration de violence qu'ils appellent " virilité " ou "macho" ils montent des étalons, alors va y dans les coups dans la bouche pour la croupade, la cabriole et la pesade, chaque pas de pas " espagnol " résonne par un coup dans les gencives, si les portugais sont plus discrets, la médaille revient aux espagnols, qui font étalage d'une brutalité que le public ne peut pas ignorer, avec la grande claque de remerciement pour une énième cabriole car on n'est plus dans du spectacle d'art mais dans une surenchère que seuls les chevaux payent de leur physique… grand dommage, mais ces messieurs ne sont pas le reflet de leurs écoles ouvertes à tous pas pourleur niveau équestre et mais par leur portefeuille ou leur ascendance.


Pauvre Monsieur Oliviera ça doit lui faire mal que dans son propre pays, son langage n'est pas compris et que tous ces chevaux bodybuildés sont de plus en plus loin du cheval baroque si fier et si fin dans ses déplacements.
Nous avons la chance d'avoir notre Ecole de Saumur, n'avez-vous jamais été surpris que personne ne s'amuse à se déguiser en écuyer du Cadre Noir, alors que les tenues des écoles ibériques font légion dés qu'un cavalier achète un PRE ou un PSL est s'amuse sur les rectangles, à croire que l'habit ferait le moine.

une bride avec ses 2 mors, un simple mors chantilly brisé et un mors droit à pompe avec passage de langue pour la bride.


Pour en revenir, au mors, partons du principe que vous avez une bonne main, chose si précieuse et trop souvent oubliée au profit des jambes.
J'ai fait parti de ceux qui avait une bonne main dans mes premières années de cavalières, on me confiait tous les chevaux à la bouche sensible, puis j'ai monté pendant 10 ans un ex cheval d'attelage avec une bouche en béton armé et un mors de poulain.


Il n'avait connu que le tristement célèbre mors Liverpool et réformé de l'attelage, il est devenu cheval de loisir, sans frein aucun… dangereux à souhait, mal éduqué, bagarreur en plus… avec mes 16 ans mon 1.60 m et mes 48 kg, j'ai eu une première année très très difficile. Jusqu'au moment où j'ai dit à son proprio, stop, je ne peux plus, du coup avec l'aide de Bruno Bouvier, excellent cavalier et enseignant, j'ai utilisé le fameux goyo aga, c'était dans les années 1980, et là sans être pendu au mors comme avant, juste le fait d'avoir un mors droit avec passage de langue et gourmette, mon gros Frac m'a enfin respecté, et mes épaules ont enfin pu redevenir féminine.

Je n'avais plus 500 kg dans chaque bras, juste le fait que je pouvais sanctionner lorsqu'il baissait le nez au raz du sol et partait en coup de cul au galop… c'était son truc, un sacré tempérament, une cavalière encore plus têtue que lui et nous voilà dans un autre registre. Fini la bagarre, on apprend à mieux se connaitre et enfin il ne prend plus appui sur le mors, il n'est plus sur les épaules comme l'attelage lui a appris, il bascule et son arrière main passe dessous et tout devient enfin accessible, piaffer, passage, travail de changement de pied au galop. Tout ça grâce à un mors adapté à sa nouvelle discipline et son caractère.

 


Les mors d'attelage sont très puissants et pour cause, ils sont le seul lien entre le meneur et le cheval, le frein et la direction sont prioritaires sur tout. Les chevaux d'attelage ont une très bonne éducation à la voix, mais en cas de pépin, il faut donner un maximum de chance au meneur d'arrêter son attelage, un cheval ça va, mais 2, 4 ou 6 vous imaginez la puissance, du coup voilà les mors coup de poing ou brise mâchoires. J'ai fait de l'attelage, j'ai traversé seule une ville où devait se dérouler un concours CSO et une présentation d'attelage. Il y avait des voitures stationnées des 2 côtés de la route, avec mon cher Frac qui avait pour l'occasion un mors coup de poing. J'ai fait un gym cana entre des vélos, des poussettes, des piétons, pour rejoindre à 5 km, qui m'ont paru le triple, notre point de rassemblement. J'ai compris qu'avoir un mors un peu plus incisif peut là aussi sauver des vies.

Tous les chevaux de travail, qui ont en " charge " la vie de leur cavalier ont aussi des mors durs, on peut le concevoir, un taureau espagnol de 800 kg qui vous charge, il est impératif pour la survie du cavalier comme du cheval que la réaction soit rapide, ces chevaux sont en général très bien dressés, de vrais professionnels, et leurs cavaliers connaissent la valeur d'un bon cheval de tri, leur vie en dépend, on dira que la fin justifie les moyens.

cheval camargue avec les cuirs tradition camargue, mors de travail.
J'ai eu l'occasion de monter Rif, un superbe étalon camarguais avec un de ces fameux mors, néophytes en tri de taureau Camargue, j'ai tout simplement fait mon maximum pour ne pas ennuyer mon cheval, il connaissait son boulot par cœur, calée dans ma selle Camargue, j'ai juste joué les clandestines discrêtes.

Rif, étalon camargue, un vrai professionnel du tri de bétail
Par contre, j'ai monté un jeune cheval espagnol qui n'y connaissait strictement rien au tri des taureaux " espagnols " une catégorie, pour ne pas dire la catégorie de bovins la plus dangereuse qui soit. Lui comme moi, devions juste ouvrir et fermer un portail dans la colline, et se tenir assez loin d'une vingtaine de bestiaux fonçant droit sur nous. Là j'ai eu peur, mon cheval autant que moi, le mors dur a été très utile pour le faire sortir de sa torpeur et partir non pas au galop mais bien ventre à terre … les taureaux ont suivi leur route, mais le cheval comme moi étions prêts à sauter la clôture de 2 m, on s'est arrêté parce que j'avais un bon frein, je n'en suis pas fière mais parfois dans la vie, on ne choisit pas, et j'ai nettement regretté mon petit Camargue et cela a été ma première et dernière expérience dans le domaine.


J'ai surpris une conversation entre deux cavaliers sur les licols éthologiques, mot pompeux pour les licols en cordelette bien colorée. L'un disait que c'était très agressif, l'autre ne jurait que par son utilisation et vantait le fait qu'il n'y ait plus de mors.
Oui c'est super génial de ne plus mettre de mors, mais il faut absolument que le cheval soit obéissant, je ne parle même pas de dressage, juste lorsque vous dites " ho " il s'arrête, " viens " il vient vers vous et tient sa place à vos côtés, comme vos chiens qui je le sais sont très bien aux ordres. Les chevaux peuvent en faire autant, le truc, tout bête c'est de PRENDRE LE TEMPS de leur apprendre et ça le temps, plus personne n'en a… du temps.
Donc on va au plus rapide, mais on oublie que 500 kg non gérer, c'est l'accident assuré, pour lui, pour vous, pour un tiers.


Non on n'attache pas un cheval avec un licol éthologique tous les jour, c'est le rôle du licol plat, confortable et non dangereux.


Pour moi une exception, en rando, vu qu'il est plus léger, c'est agréable,


Le licol éthologique est un outil de travail, et surtout d'éducation, on apprend au cheval sans lui abimer la bouche. Ma jolie trotteuse de 3 ans a été éduquée avec un tel licol, elle est toute facétieuse quand elle a le licol plat, limite " je fais ce que je veux ", mais dès qu'elle a le licol éthologique, une image, le temps de remonter du parc à la maison, je ne prends pas le risque de la voir s'échapper et le petit licol rempli très bien son rôle, pour le pansage on passe au licol plat…


Il y a 30 ans de ça, le licol étho n'existait pas, et les maquignons faisaient leurs licols avec des cordes à lieuse, car un jeune cheval sans moyen de contention, quand il décide de partir, soit vous avez droit à être trainer sur le ventre pendant X mètres, soit vous lâchez tout et malheur il comprendra vite comment refaire la chose, soit dès le début, vous vous donnez les moyens avec vos 40 kg, un peu de carottes et un bon licol pas gentil quand on tire dessus comme une bourrique. Ensuite tout vient du cavalier, il va devoir lui apprendre le respect. Je le dis sans cesse RESPECT = SECURITE. C'est de la logique.
Alors le jeu du licol comme ci comme ça, je trouve qu'on a déjà bien du soucis avec les mors, sachons utiliser les choses à bon escient.

Maintenant le choix, mors brisé, une brisure, deux brisures, mors en résine, mors en cuivre, mors droit, mors double, mors abaisseur, mors releveur. Au musée du cheval à Chantilly, j'avais déjà vu une belle collection du monde entier, beaucoup se comprennent par leur utilisation, le pays, mais avec l'évolution on aurait pu s'attendre à plus de simplicité et de confort tout en gardant de l'efficacité. Ce qui est effrayant c'est que ceux qui les vendent ne s'y connaissent pas plus que ça, tout comme les enseignants.
Il y a les mors qui sont à la mode, d'autres qui sont beaux, là où il faut se méfier c'est que les décorations extérieures soient bien que des décorations, certains mors qui ont des anneaux se rapprochant du mors chantilly qui a la réputation d'être le plus doux de tous, sont en faits des mors tordus et extrêmement méchants et souvent dans les mains d'un " singe ".

 

 

 

Après cette introduction un peu longue, la question reste quel mors ? pour quel cheval ?
et quel cavalier ? donc en page 2 j'ouvre le débat, je vais vous parler des miens puis tous ceux qui le désirent pourront expliquer le rôle du mors qu'il utilise en fonction de leur cheval et de leur discipline, car tous les selliers qui j'ai interroger sont très perplexes voir perdus dans les explications. Qui mieux que nous peut dire les avantages et les inconvenients d'un mors.

 

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